La recherche en psychanalyse et les éprouvés de manque.

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Cette confé­rence a été don­née dans le cadre de la Confé­rence annuelle de recherche de la Socié­té bri­tan­nique, Londres, mer­cre­di 2 décembre 2020.
Elle a pour sous titre : « TRANSPOSER, CHERCHER, TROUVER, RÊVER, RECHERCHER, DÉCOUVRIR, PARTAGER… OFFRIR AU DESTIN »

Vous trou­ve­rez la ver­sion en anglais à la suite de la ver­sion fran­çaise, ici.


Je vous remer­cie pour votre invi­ta­tion qui m’honore. Je remer­cie Brian O’Neill et tous les membres de la Com­mis­sion scien­ti­fique, ain­si que Rosine Per­el­berg, votre pré­si­dente, avec laquelle j’entretiens des liens ami­caux et de tra­vail depuis de nom­breuses années. La semaine der­nière encore nous avons ani­mer ensemble un webi­naire, en fran­çais !
Mon regret porte sur le fait de devoir vous par­ler depuis la France ; je suis pri­vé d’être à Londres en votre com­pa­gnie. J’en pro­fite pour sou­li­gner que le tra­vail de la pen­sée à dis­tance est cer­tai­ne­ment excellent du point de vue des repré­sen­ta­tions et des émo­tions mais qu’il lui manque cette autre part de la pen­sée qui prend en compte la per­cep­tion sen­so­rielle. D’où par­fois au cours des séances à dis­tance une intense acti­vi­té psy­chique, voire même un appel au régime hal­lu­ci­na­toire pour four­nir des maté­riaux en « iden­ti­té de per­cep­tion » afin de répondre au manque à per­ce­voir. Le tan­gible nous manque.
Je crains que cette solu­tion à dis­tance attire encore plus votre atten­tion sur les défauts majeurs de ma pro­non­cia­tion et mes dif­fi­cul­tés à quit­ter ma langue mater­nelle au pro­fit de la vôtre. Une conso­la­tion consis­te­rait à insis­ter sur le « char­ming French accent » et sur le fait que c’est mon mater­nel qui ne veut pas me lâcher. Maigre conso­la­tion !
Mais savoir que vous pou­vez lire mon texte tout en m’écoutant, me fait espé­rer en votre indul­gence. Je vous en remer­cie.

Cette épreuve à laquelle vous me sou­met­tez ce soir et à laquelle je me prête volon­tiers illustre bien ce dont je sou­haite vous par­ler. Expo­ser sa pen­sée à d’autres, d’autant plus quand ils sont bien­veillants, c’est prendre le risque de res­sen­tir des éprou­vés de manque sans les­quels il n’y aurait aucun pro­grès. La célèbre pul­sion de per­fec­tion­ne­ment, récu­sée par Freud en tant que telle, trouve cer­tai­ne­ment ici ses ori­gines. M’adresser à vous en anglais et à dis­tance exa­cerbe ain­si plus qu’à l’accoutumée les éprou­vés de manque avec leur arrière fond trau­ma­tique. J’aurais pu ne pas accep­ter votre invi­ta­tion. Mais nous savons com­ment l’auto-inhibition est une culture de l’auto-idéalisation. A l’opposé, pré­sen­ter sa pen­sée à d’autres c’est se sou­mettre à l’épreuve du manque et rendre pos­sible une pro­gres­sion. Une recherche ne se fina­lise que par sa publi­ca­tion et l’épreuve du par­tage et de son des­tin grou­pal. Il en est de même pour la théo­rie. Freud, puis Bion, nous ont appris qu’une théo­rie doit être pous­sée jusqu’à ses limites, jusqu’à ce qu’elle suc­combe à une épreuve de réa­li­té, jusqu’à ce qu’elle devienne elle-même man­quante et laisse la place à une autre. Accep­ter d’éprouver les affects de manque est à la base de toute évo­lu­tion tant per­son­nelle que scien­ti­fique. Je revien­drai sur le lien entre ces éprou­vés, le fait de cher­cher et son des­tin en tant que recherche.

La situa­tion sani­taire inter­na­tio­nale nous confronte actuel­le­ment, d’une façon qua­si expé­ri­men­tale, à de tels éprou­vés en lien direct avec l’état trau­ma­tique pro­vo­qué par le Coro­na­vi­rus et par le bris du déni des pan­dé­mies dans lequel nos pays occi­den­taux riches vivaient. La der­nière pan­dé­mie prise en compte en occi­dent est deve­nue mythique, il s’agit de la grippe espa­gnole entre 1917 et 1920. Les autres épi­dé­mies sont pas­sées inaper­çues, aus­si bien en 1957 qu’en 1969, ou bien ont été consi­dé­rées comme des mala­dies rele­vant d’autres conti­nents. Cette situa­tion pour­rait faci­li­ter un trompe l’œil dans la mesure où les éprou­vés de manque et les vécus trau­ma­tiques sont immé­dia­te­ment attri­bués à une cause externe objec­ti­vable. Le manque à savoir à pro­pos du virus et le manque à gué­rir la mala­die ont sus­ci­té de colos­saux tra­vaux de recherche. Ain­si le contexte actuel se trouve-t-il en adé­qua­tion avec notre thème, la recherche, avec ses sources et le mou­ve­ment psy­chique qui consiste à cher­cher et qui est à l’origine de ce que nous appe­lons « la recherche ». Les cir­cons­tances actuelles ont sus­ci­té une grande quan­ti­té d’écrits, de tra­vaux, de recherches dans tous les domaines, psy­cha­na­ly­tique aus­si, puisque de nom­breux écrits, articles, forums et livres ont été publiés ou vont l’être, pro­duits par de nom­breux psy­cha­na­lystes du monde entier. Per­son­nel­le­ment, je me suis plus par­ti­cu­liè­re­ment atta­ché à pen­ser les modi­fi­ca­tions que cette situa­tion a engen­dré dans notre pra­tique, mais sur­tout à pen­ser l’effet de réver­bé­ra­tion qu’elle a sur cer­tains aspects de notre pra­tique habi­tuelle, en par­ti­cu­lier le rôle du couple per­cep­tion-repré­sen­ta­tion au sein des séances, couple pas­sant habi­tuel­le­ment inaper­çu et qui reste en silence dans le cadre. Cette piste per­met de mieux abor­der une ques­tion d’actualité dans le champ psy­cha­na­ly­tique, celle des ana­lyses à dis­tance (remote ana­ly­sis) com­pa­rée aux ana­lyses en pré­sence. La ques­tion du rôle mais aus­si de la fonc­tion de la per­cep­tion sen­so­rielle directe de l’autre par sa pré­sence cor­po­relle, n’est pas ano­dine, avec l’écart entre cette per­cep­tion sen­so­rielle et sa repré­sen­ta­tion. La per­cep­tion sen­so­rielle exige de la vie men­tale des fonc­tion­ne­ments dif­fé­rents de ceux uti­li­sés lors des ana­lyses à dis­tance, qui elles convoquent et déve­loppent sur­tout les autoé­ro­tismes psy­chiques. Il n’est donc pas pos­sible d’affirmer qu’une ana­lyse faite à dis­tance est équi­va­lente à une ana­lyse en pré­sence. Ceci ouvre un pan de recherche sur la per­cep­tion, sur le fait qu’il y a au niveau de la per­cep­tion quelque chose qui ne peut pas être abor­dé par les repré­sen­ta­tions et les émo­tions et qui exige la pro­duc­tion de la pen­sée. Cet écart per­cep­tion – repré­sen­ta­tion-émo­tion ne peut pas être sup­pri­mé par la créa­tion hal­lu­ci­na­toire des iden­ti­tés de per­cep­tion. Par contre, grâce à l’identité de per­cep­tion, le tra­vail de rêve par­vient à satu­rer la per­cep­tion interne ce qui per­met le repos du som­meil ; d’où la convic­tion du rêveur qu’il n’y a qu’un monde, celui du rêve. Repré­sen­ta­tion et per­cep­tion ne font qu’un durant le temps du rêve grâce à l’identité de per­cep­tion. Mais nous nous réveillons.

Je ne sui­vrai donc pas cette sim­pli­fi­ca­tion que la situa­tion actuelle nous pro­pose, mais m’orienterai vers ce qui ini­tie la recherche, le besoin de cher­cher tel qu’il appa­rait pour des rai­sons internes au psy­chisme sans qu’il soit for­cé­ment induit par un agent externe trau­ma­tique.

Mon pro­pos place les éprou­vés de manque et ceux sous-jacents trau­ma­tiques à l’origine d’un pre­mier temps qui consiste à cher­cher, et qui pour­ra deve­nir dans un second temps, une acti­vi­té de recherche. Le « re » du fran­çais trouve ici sa jus­ti­fi­ca­tion.  En Anglais vous uti­li­sez deux mots : to seek et to research ; plus proche du fran­çais seraient, to search et to research.
Les situa­tions dites trau­ma­tiques, objec­ti­vables et externes au cher­cheur, entrent en cor­ré­la­tion avec ses éprou­vés de manque d’origine endo­gène. La source est du côté de ces éprou­vés qui sont plus ou moins for­te­ment éveillés par les cir­cons­tances externes, telles que les absences, des­truc­tions, pertes, dis­pa­ri­tions.
Vous connais­sez tous la célèbre scé­nette des deux Clowns. Sur la scène, se tient Auguste. Il tourne en rond dans le fais­ceau des pro­jec­teurs ; il semble cher­cher, peut-être quelque chose. Le clown blanc arrive, l’observe et lui demande ce qu’il fait. Auguste répond qu’il cherche ; « quoi » lui demande l’autre ; « ma montre » (le signi­fiant montre n’est pas indif­fé­rent ni en fran­çais, ni en anglais). Le Clown blanc lui demande alors s’il est sûr de l’avoir per­due ici. « Non » répond Auguste. « Alors, pour­quoi la cherches-tu ici » ; « Parce qu’il y a de la lumière » !

Cette his­to­riette nous pré­sente un homme qui cherche, la dési­gna­tion d’un objet cher­ché cen­sé être un objet per­du, le lieu de la recherche. Au-delà du conflit entre la lumière et l’obscurité se tient celui entre exis­ter et dis­pa­raître au fon­de­ment de la pho­bie infan­tile du noir.
La montre s’avère être l’enfant lui-même ayant la pho­bie de dis­pa­raître dans le noir.  Nous voi­ci avec le For – Da, avec les pho­bies infan­tiles et le « jeu » qui consiste à créer ses propres pro­ces­sus de rete­nue anti-trau­ma­tiques, ceux qui seront néces­saires à la mise en place du tra­vail psy­chique per­met­tant de trai­ter men­ta­le­ment les sépa­ra­tions et les deuils. Le sujet se cherche en recher­chant ce qui le montre.
J’ai fait réfé­rence à plu­sieurs reprises à cher­cher, recher­cher, théo­ri­ser, sans par­ler de science. Tous ces termes dési­gnent des champs dif­fé­rents. Je pri­vi­lé­gie ce soir le besoin de cher­cher, en fait la néces­si­té de cher­cher-trou­ver, afin de pou­voir fabri­quer des théo­ries cau­sales qui relient les éprou­vés trau­ma­tiques à des objets tan­gibles qui seront dès lors qua­li­fiés de trau­ma­tiques. Ces théo­ries four­nissent des expli­ca­tions ayant pour fonc­tion d’atténuer les éprou­vés de menace et de dis­pa­ri­tion. Elles trans­forment les impres­sions floues de manque en un sen­ti­ment de manque de quelque chose, un quelque chose qui est cen­sé faire ces­ser le manque, au moins le repré­sen­ter et expli­quer son avè­ne­ment. La théo­rie du fan­tasme ori­gi­naire de cas­tra­tion par le père est typique de ce besoin de théo­ries expli­ca­tives.

Quand « trou­ver » n’a pas lieu, s’installe une com­pul­sion de répé­ti­tion à cher­cher. Quant à la foca­li­sa­tion sur un objet, elle peut don­ner lieu à une quête qui se tourne vers un objet idéal hors d’atteinte, hors repré­sen­ta­tion, ima­gi­naire ; la quête du Graal et de la pierre phi­lo­so­phale.
Ces objets trou­vés seront choi­sis pour des rai­sons qui peuvent don­ner lieu ensuite à une recherche, par exemple sur le choix d’objet, le choix de l’analyste par les patients, etc. L’acte de cher­cher, de trou­ver un objet ain­si élu et de théo­ri­ser une cau­sa­li­té entre les éprou­vés et les objets choi­sis, fonde une rete­nue à par­tir de laquelle pour­ront se déve­lop­per le psy­chisme et les divers inves­tis­se­ments dont celle de la recherche. Tel est le rôle des théo­ries sexuelles infan­tiles.
Le fait que cette recherche devienne scien­ti­fique exige une autre étape, une épreuve de réa­li­té qui reste tou­jours énig­ma­tique du point de vue du fonc­tion­ne­ment psy­chique. Toutes les solu­tions pro­po­sées par Freud ont été suc­ces­si­ve­ment jugées insuf­fi­santes par lui-même. Cette épreuve se fait en plu­sieurs étapes qui sont à rec­ti­fier chaque fois que le contexte pris en compte s’enrichit d’un nou­veau para­mètre.

C’est ain­si que les éprou­vés de manque vont créer un besoin de trou­ver quelque chose qui offre la pos­si­bi­li­té de sor­tir de cet état ; ce besoin sou­tient le fait de le cher­cher, voir de le créer. Nous connais­sons tous le mot de Picas­so : « Je ne cherche pas, je trouve » sou­li­gnant bien l’urgence à trou­ver. Nous voi­ci avec la série : cher­cher, trou­ver, créer. Ce qui est trou­vé n’est pas encore une décou­verte, mais un élé­ment de la réa­li­té qui pour­ra don­ner lieu dans un second temps à une décou­verte. Cet élé­ment par­ti­cipe d’abord à la fonc­tion de rete­nue. Du point de vue de cette fonc­tion anti trau­ma­tique du cher­cher-trou­ver, nous pou­vons dire que toute décou­verte relève de la séren­di­pi­té, du hasard et de l’aléatoire, puisque ce qui est cher­ché à l’origine est de faire ces­ser le vécu trau­ma­tique.
Cher­cher, c’est donc avant tout répondre aux éprou­vés trau­ma­tiques liée à l’angoisse de sa propre dis­pa­ri­tion, en cher­chant ce qui pour­rait per­mettre de résoudre cet effroi géné­ra­le­ment dis­si­mu­lé sous les vécus de manque.

Appro­chons ces éprou­vés trau­ma­tiques. Dans un pre­mier temps, Freud a asso­cié les éprou­vés de manque avec le refou­lé. Il s’agissait pour lui de com­plé­ter l’amnésie infan­tile sur le modèle d’une table de Men­de­leïev, mais aus­si de retrou­ver par la régres­sion les expé­riences du pas­sé por­teuses de la qua­li­té trau­ma­tique, les per­cep­tions de séduc­tion sexuelle pré­coce, puis les mani­fes­ta­tions trop pré­coces de la sexua­li­té infan­tile. Dans sa concep­tion sui­vante, la régres­sion du rêve est cen­sée per­mettre de retrou­ver un état nar­cis­sique abso­lu, celui du fan­tasme de retour au giron mater­nel et à la vie intra-uté­rine, la mère étant occu­pée à pro­té­ger son enfant de la sexua­li­té, qui fait retour du dehors par le père sexuel. Dans les deux cas, le trau­ma­tique vient du sexuel, le manque étant dû au fait de ne pas arri­ver à refou­ler le sexuel ou à l’éliminer. Sans être fausses ces deux concep­tions vont suivre une inté­rio­ri­sa­tion de l’origine de la qua­li­té trau­ma­tique. Celle-ci s’avère être une qua­li­té interne à la pul­sion, et non pas une sexua­li­té infan­tile trop tôt éveillée à l’objectalité, ni une sexua­li­té venant mena­cer un nar­cis­sisme abso­lu. Ce carac­tère inhé­rent à toute pul­sion, c’est leur ten­dance régres­sive la plus élé­men­taire, leur ten­dance à faire un retour à un état anté­rieur jusqu’au sans-vie, jusqu’à l’inorganicité. Nous retrou­vons les vécus d’effroi et de dis­pa­ri­tion, en tant qu’ils tra­duisent cette ten­dance pre­mière de toute pul­sion qu’elle soit de vie ou de mort. Il s’agit d’une ten­dance extinc­tive que je dénomme la régres­si­vi­té extinc­tive. C’est vis à vis de cette ten­dance que s’impose le besoin d’établir une rete­nue, et pour cela de cher­cher, de trou­ver et d’établir une théo­rie cau­sale entre les vécus trau­ma­tiques et les objets per­çus choi­sis. Cette rete­nue fonde le deve­nir psy­chique par un renon­ce­ment à l’extinction immé­diate. Elle est à l’origine du désir et de la pen­sée qui se déploie sur un fond de maso­chisme pre­mier pro­duit par la ten­sion de la rete­nue.

La recherche et la théo­rie sont donc des moyens pour répondre à cette ten­dance extinc­tive, à son urgence trau­ma­tique, d’où la convic­tion qui les accom­pagne. Celle-ci se reporte sur les théo­ries et sur les décou­vertes au moment où elles sont faites, dans le but d’assurer une satu­ra­tion de la conscience. Une nou­velle décou­verte est tou­jours vécue comme la pièce man­quante, le maillon man­quant. Le Euré­ka est cet effet de véri­té auquel le cher­cheur adhère pour des rai­sons internes. C’est seule­ment dans un second temps que cet acte de rete­nue pour­ra deve­nir un sou­hait de savoir, une appé­tence ou plus sim­ple­ment une curio­si­té envers les choses qui auront d’abord été trou­vées par néces­si­té et uti­li­sées à des fins anti trau­ma­tiques grâce au recours à la per­cep­tion sen­so­rielle.
Nous ren­con­trons ici les logiques des névroses trau­ma­tiques et leur ten­ta­tive d’évoluer vers des solu­tions psy­chiques par le biais de l’accrochage à la per­cep­tion de réa­li­tés tan­gibles pou­vant don­ner lieu à des traces puis des conte­nus psy­chiques. Ces réa­li­tés sont per­çues au moment où la qua­li­té trau­ma­tique a été éprou­vée. Freud les a nom­mées les réa­li­tés « voi­sines » (1937). Un lien de rete­nue s’établit alors entre cette qua­li­té et les réa­li­tés voi­sines.

Ce n’est qu’en 1923 que Freud recon­naît cette fonc­tion de la per­cep­tion qui offre la pos­si­bi­li­té d’établir un accro­chage de rete­nue. Il écrit dans le moi et le ça, que « ce qui pro­ve­nant de l’intérieur veut deve­nir conscient doit ten­ter de se trans­po­ser en per­cep­tions externes » (OCFP XVI p.264–265). Il fait ain­si de la trans­po­si­tion le méca­nisme de base du déve­lop­pe­ment du psy­chisme et du deve­nir conscient ; mais aus­si celui qui per­met de créer les outils de la connais­sance du monde externe. Vous avez tous en mémoire sa petite phrase de 1939 par laquelle il place la trans­po­si­tion à l’origine de la notion de spa­tia­li­té. Je le cite : « La spa­tia­li­té pour­rait bien être la pro­jec­tion de l’extension de l’appareil psy­chique. Vrai­sem­bla­ble­ment aucune autre déri­va­tion. Au lieu des condi­tions a prio­ri de notre appa­reil psy­chique selon Kant. La psy­ché est éten­due, n’en sait rien » (OCF.P XX, p. 320). La même logique peut être déployée avec la notion de temps par le biais de la dis­con­ti­nui­té et de l’intermittence du psy­chisme qui n’en sait rien. Les qua­li­tés incons­cientes du psy­chisme sont ain­si trans­po­sées sur la réa­li­té exté­rieure. D’où la pre­mière appré­hen­sion ani­miste du monde par la créa­tion de méta­phores. L’intériorisation de celles-ci et leur uti­li­sa­tion par les rêves per­met de fabri­quer les ins­crip­tions psy­chiques. Ce tra­jet, né d’un besoin du psy­chisme de répondre aux éprou­vés de manque trau­ma­tiques, est à la base d’une uti­li­sa­tion de la per­cep­tion du monde externe et par ce biais d’une pre­mière aper­cep­tion du monde. Ensuite sera faite la dif­fé­ren­cia­tion entre ce qui relève du monde externe et du psy­chisme. Les sciences s’inscrivent sur ce tra­jet psy­chique. Elles pro­fitent de ce besoin du psy­chisme d’utiliser le monde externe. La connais­sance du monde est un effet de sur­croit, elle est une recon­nais­sance. Par contre, la recon­nais­sance de la réa­li­té psy­chique néces­site de pour­suivre ce che­mi­ne­ment. La psy­cha­na­lyse est une science seconde par rap­port à la connais­sance de la réa­li­té externe.

Pour accé­der à la réa­li­té du psy­chisme, il faut prendre en compte ce tra­jet lui-même. Il débute par une trans­po­si­tion ini­tiale, puis une méta­pho­ri­sa­tion, puis le tra­vail de rêve dont l’interprétation per­met d’aboutir à la recon­nais­sance des sou­haits incons­cients et par déduc­tion de l’attraction régres­sive des ten­dances extinc­tives.

Vous recon­nais­sez ici le tra­jet même réa­li­sé par Freud. Chaque fois qu’il a pris en compte de nou­veaux élé­ments de la cli­nique, il a rédi­gé un nou­vel apport à sa doc­trine du rêve, la Traum­deu­tung. Pour deve­nir une science, les réa­li­tés de ce tra­jet devront être prises elles-mêmes en tant qu’objets spé­ci­fiques et dési­gnés au sein d’un cor­pus de concepts per­met­tant d’en pro­po­ser une intel­li­gi­bi­li­té.
C’est ici que l’épistémologie psy­cha­na­ly­tique se dis­tingue de celle plus clas­sique des sciences, en par­ti­cu­lier du posi­ti­visme. La psy­cha­na­lyse découvre au-delà de la posi­ti­vi­té des conte­nus psy­chiques impli­qués dans le fonc­tion­ne­ment psy­chique, au-delà de la posi­ti­vi­té de la néga­ti­vi­té de l’inconscient, une qua­li­té pul­sion­nelle qui ne s’inscrit ni dans le posi­ti­visme ni dans la néga­ti­vi­té posi­tive, puisqu’elle tend au contraire à les faire dis­pa­raître.

Cette trans­po­si­tion sur des réa­li­tés exté­rieures grâce aux per­cep­tions sen­so­rielles, est un détour par l’autre et par le monde exté­rieur, le corps propre inclut. Dans ce cas la trans­po­si­tion se dénomme conver­sion, terme for­gé par Freud. Ces trans­po­si­tions per­mettent aus­si l’utilisation de cet autre par iden­ti­fi­ca­tion (le Neben­mensch, les per­sonnes aux­quelles est confé­rée une auto­ri­té, l’analyste).
Ce détour est à l’origine de la décou­verte et de la recon­nais­sance du monde exté­rieur selon diverses moda­li­tés qui ne sont pas scien­ti­fiques à l’origine. La ten­dance extinc­tive va se trans­po­ser sur ce monde exté­rieur, sur le tan­gible qui donne lieu à des traces et des repré­sen­ta­tions, mais aus­si sur des réa­li­tés non tan­gibles, les absences, pertes et dis­pa­ri­tions qui ne peuvent don­ner lieu ni à des traces, ni à des repré­sen­ta­tions, ni à des res­sen­tis et qui exigent une uti­li­sa­tion des conte­nus fabri­qués à par­tir du tan­gible, conte­nus qui ne sont donc pas spé­ci­fiques des per­cep­tions ne don­nant pas lieu à des traces. Le fait que le pro­ces­sus de la pen­sée humaine soit en deux temps, reflète et prouve l’existence de réa­li­tés sans repré­sen­ta­tions (la trace man­quante). Pour s’opposer aux ten­dances régres­sives extinc­tives, les conte­nus issus de la réa­li­té tan­gible devront eux-mêmes suivre un tra­jet régres­sif et par­ti­ci­per à un tra­vail d’inscription de ces traces en ins­crip­tions psy­chiques. Les conte­nus uti­li­sés pour la rete­nue doivent être rêvés avant d’être dis­po­nibles pour recon­naître ensuite le monde en tant que tel. C’est alors, dans un second temps, après que le pre­mier temps de rete­nue puis que l’entre deux temps du rêve ait été réa­li­sés que peut se déployer une recherche sur ces objets du monde ayant été d’abord cher­chés-trou­vés puis rêvés et qui sont deve­nus des objets à décou­vrir, des objets de la recherche.
Le deuxième temps, plus ou moins libé­ré des néces­si­tés psy­chiques, est un temps d’ouverture au monde et de décou­verte, de redé­cou­verte et de recon­nais­sance. Le tra­vail de recherche se fait donc en plu­sieurs temps : cher­cher un maté­riau per­met­tant la mise en place d’une rete­nue, inté­rio­ri­ser ce maté­riel et l’utiliser par le rêve pour répondre aux ten­dances régres­sives extinc­tives, puis pro­mou­voir le désir d’investir le monde, de le connaître, de l’apprécier, de le trans­for­mer et de le modi­fier par la créa­tion de nou­veaux élé­ments fai­sant que le monde d’après n’est plus le monde d’avant.

Ce pro­cès en deux temps, celui de l’après-coup, rem­plit dans un pre­mier temps une fonc­tion psy­chique de rete­nue, puis il héberge le tra­vail de rêve qui fabrique les ins­crip­tions psy­chiques, en par­ti­cu­lier les repré­sen­ta­tions de chose, et enfin il éla­bore des conte­nus aptes à deve­nir conscients à par­tir des­quels pour­ront se déployer tout ce que l’homme est capable de créer par plai­sir, par curio­si­té, par sou­la­ge­ment, par évi­te­ment, par pro­tec­tion, par sou­hait d’organiser le monde et de répondre à ce qui demeure mys­té­rieux ; d’où les arts, les reli­gions, les idéo­lo­gies, les sciences, les poli­tiques et aus­si les ins­ti­tu­tions. Tous ces champs de la culture gardent en eux le fait qu’ils ont été à l’origine des for­ma­tions psy­chiques qui se sont déployées ensuite en tant que domaines spé­ci­fiques.
La psy­cha­na­lyse a modi­fié l’épistémologie des sciences par l’introduction du rêve et de son inter­pré­ta­tion, mais aus­si par la prise en compte de la fonc­tion du rêve et de la fonc­tion de l’interprétation envers cette réa­li­té élé­men­taire de toute pul­sion de tendre à sa propre dis­pa­ri­tion, à son extinc­tion. Pour la psy­cha­na­lyse le tra­jet de la connais­sance inclut un détour par des for­ma­tions assu­rant d’abord la mécon­nais­sance. Il ne s’agit pas seule­ment d’un manque à savoir, com­mun à toutes les sciences, mais de la néces­si­té de prendre en compte ces ten­dances extinc­tives et de leur faire subir une dis­si­mu­la­tion avant de pou­voir déduire leur exis­tence par une inter­pré­ta­tion. Le savoir a aus­si fonc­tion de dénier cette part de la réa­li­té qui devient une véri­té inat­tei­gnable. La science n’est pas seule­ment un manque à savoir à com­bler, une suite d’erreurs à rec­ti­fier, c’est aus­si un savoir à laquelle il manque la véri­té. La connais­sance suit un tra­jet de quête de la véri­té à laquelle elle doit renon­cer pour deve­nir un savoir.

De nom­breux débats ont por­té sur le fait de savoir si la psy­cha­na­lyse est une science ou non, avec la ten­dance à vou­loir for­cer la psy­cha­na­lyse afin qu’elle entre dans la défi­ni­tion clas­sique des sciences. En fait, l’épistémologie psy­cha­na­ly­tique inclut le rêve et l’interprétation ce qui devrait plu­tôt nous ame­ner à faire évo­luer la défi­ni­tion des sciences elle-même. Toute éla­bo­ra­tion scien­ti­fique a donc deux faces ; une avan­cée dans le champ tou­jours incom­plet de la connais­sance et une for­ma­tion psy­chique, une concep­tion qui a pour fonc­tion de ten­ter d’accomplir les sou­haits de com­plé­tude et d’échapper voire de dénier l’existence de la qua­li­té trau­ma­tique interne.

Vous ne serez donc pas éton­nés si la créa­tion d’une struc­ture dédiée à la recherche, ne peut que suivre la même dyna­mique que celle décrite pré­cé­dem­ment, et être concer­née par les deux faces du cher­cher et du recher­cher. La maté­ria­li­sa­tion d’une telle struc­ture rem­plit les dif­fé­rentes fonc­tions abor­dées ci-des­sus et est aus­si une mise en actes de concep­tions concer­nant la recherche pou­vant tout à la fois favo­ri­ser et limi­ter celle-ci.
Au sein de la Socié­té Psy­cha­na­ly­tique de Paris, quand j’étais pré­sident, j’ai encou­ra­gé et par­ti­ci­pé à la créa­tion d’un tel organe. Bien sûr la SPP a une Com­mis­sion scien­ti­fique et un Conseil scien­ti­fique et tech­nique. Mais leur fonc­tion n’est pas d’être des lieux de recherche, mais d’évaluer celle-ci et de l’encourager au sein de la Socié­té.

La Com­mis­sion pour la recherche et le déve­lop­pe­ment de la psy­cha­na­lyse (la CRDP) est née à la suite de nom­breux autres groupes plus ou moins for­mels qui avaient tous pour objet la recherche en psy­cha­na­lyse sans être des lieux dédiés à celle-ci. Les termes qui dési­gnent cette CRDP reprennent les pre­mières lignes des sta­tuts de la SPP. Ces groupes se sont dérou­lés à l’intérieur de l’institution mais sans que celle-ci ne leur accorde une recon­nais­sance par­ti­cu­lière. Il n’y a eu aucune cen­sure envers de telles ini­tia­tives mais une cer­taine ambi­va­lence quant à leur accor­der un sta­tut spé­ci­fique, au nom du fait que tous les sémi­naires seraient des lieux de recherche. La SPP n’avait donc pas d’organe de recherche et de réflexion sur la recherche. Durant mes man­dats s’est ain­si des­si­né le pro­jet de créer un tel lieu dont l’objet serait de cher­cher-recher­cher, une com­mis­sion per­ma­nente, ouverte et non hié­rar­chi­sée, qui s’occuperait spé­ci­fi­que­ment de la recherche et du déve­lop­pe­ment de la psy­cha­na­lyse, qui ini­tie­rait des recherches, les accueille­rait et aurait une réflexion méta­psy­cho­lo­gique et épis­té­mo­lo­gique sur la recherche elle-même. Est ain­si née la CRDP. Actuel­le­ment cette acti­vi­té est ins­crite au pro­gramme mais pas dans les règle­ments de la SPP. Cette remarque en invite une autre. La recherche trouve ses sources dans une extra-ter­ri­to­ria­li­té par rap­port au nar­cis­sisme, ce qui se reporte dans les ins­ti­tu­tions.

La CRDP a pris en compte ces élé­ments pour s’organiser. Elle est ouverte à tous les membres. Elle est com­po­sée de divers ate­liers qui sont arti­cu­lés à un espace de plé­nière. Celle-ci est le lieu de pré­sen­ta­tion, de par­tage et de confron­ta­tion des tra­vaux effec­tués au sein des ate­liers mais aus­si de tra­vaux plus indi­vi­duels éma­nant de membres de la socié­té, voire même de tra­vaux éma­nant d’autres scien­ti­fiques ayant l’occasion de tra­vailler avec des psy­cha­na­lystes de la SPP. La CRDP consacre aus­si régu­liè­re­ment des plé­nières à une réflexion sur ce qui se déroule en son sein et sur les éven­tuels liens entre ce qui s’y déroule et sa mis­sion, la recherche. Ces temps de réflexi­vi­té tentent de tenir compte du fait que comme toute autre orga­nisme, elle contient depuis sa créa­tion des élé­ments dis­si­mu­lés, des théo­ries impli­cites por­tant sur la recherche, sur la théo­rie, sur la science, qui sur­dé­ter­minent le tra­vail qui s’y réa­lise, le nour­rissent et le limitent.
La CRDP per­met un jeu entre l’individuel et le col­lec­tif. Les ate­liers se fondent autour d’un thème libre­ment choi­si par les per­sonnes qui com­posent un ate­lier et qui se sont choi­sis libre­ment. Ce tra­vail en petites équipes non hié­rar­chi­sées favo­rise les saillances et les incises indi­vi­duelles. Quant au col­lec­tif il se situe à plu­sieurs niveaux. Tout d’abord les plé­nières qui réunissent des col­lègues inté­res­sés et cri­tiques, ambi­va­lents et bien­veillants. Un autre niveau est celui de l’ensemble des membres qui connaissent l’existence de la CRDP mais qui sont soit indif­fé­rents soit hos­tiles soit favo­rables, mais qui sou­haitent res­ter à l’écart. Enfin, évi­dem­ment, le champ cultu­rel grou­pal et de masse, l’ouverture des tra­vaux sur le monde exté­rieur par les diverses publi­ca­tions indi­vi­duelles et col­lec­tives.
Ce jeu entre indi­vi­duel et col­lec­tif n’est pas sans trou­ver des échos dans l’histoire des sciences avec les des­tins sou­vent sur­pre­nants de l’intégration par les pairs, de la dif­fu­sion, de la divul­ga­tion et de la vul­ga­ri­sa­tion de la science. Com­ment des décou­vertes scien­ti­fiques deviennent des objets de culture, voire rejoignent le fonds cultu­rel de masse, reste un mys­tère qui ne se contrôle pas ; de même que les défor­ma­tions, contre­sens, fausses pater­ni­tés, pas­sions, espoirs, idéa­li­sa­tions qu’elles subissent. Il s’agit aus­si de l’histoire des oublis et des ban­nis­se­ments (Gali­lée bien sûr). A été évo­qué un « bureau des idées trou­vées et per­dues », sans que nous puis­sions pré­ci­ser les­quelles vont suivre un par­cours de mise en latence annon­çant leur retour futur et celles qui seront défi­ni­ti­ve­ment effa­cées.

Un exemple sché­ma­tise par­fai­te­ment l’organisation en deux temps de l’intégration des décou­vertes et avan­cées scien­ti­fiques. Celui des lois de la ther­mo­dy­na­mique. La loi dési­gnée pre­mière loi fut décou­verte 40 ans après celle dénom­mée seconde. Celle-ci a subi un des­tin de dis­pa­ri­tion et n’a pu resur­gir qu’après l’acceptation de celle qui est dénom­mée pre­mière. La pre­mière loi décou­verte était celle de Car­not qui affir­mait que tout tra­vail s’accompagne d’une perte d’énergie. Celle qui est deve­nue la pre­mière loi, décou­verte 40 ans plus tard, est celle de Joule qui est une loi d’équivalence affir­mant que tout se trans­forme et que rien ne se perd, renouant ain­si avec le prin­cipe de Lavoi­sier, lui-même issu de la phi­lo­so­phie grecque, d’A­naxa­gore. Le prin­cipe d’équivalence dénie la perte. Il est immé­dia­te­ment accep­té et pla­cé en fron­ton.
Les exi­gences du psy­chisme sont donc impli­quées dans cette dyna­mique en deux temps avec dis­pa­ri­tion et résur­gence. Le chif­frage des deux lois a gar­dé la trace de cette dyna­mique symp­to­ma­tique.

Pour conclure, le mon­tage que je viens de vous pré­sen­ter a pris en compte les dif­fé­rents para­mètres qui com­posent un tra­jet com­plexe régré­dient et pro­gré­dient : trans­po­ser, cher­cher, trou­ver, rêver, recher­cher, décou­vrir, par­ta­ger… offrir au des­tin des logiques grou­pales et de masse.
Du point de vue psy­chique les sources de la recherche sont en extra­ter­ri­to­ria­li­té. Cher­cher-trou­ver a pour but pre­mier d’établir une rete­nue. Enri­chir le nar­cis­sisme de la science, sera un second but par lequel pour­ront se satis­faire nos dési­rs de savoir, de connaître, de décou­vrir, d’inventer, tous issus de notre désir d’enfanter et de celui de savoir d’où viennent les bébés ; mais aus­si de le subli­mer en un désir de savoir d’où viennent les enfants de nos psy­chés, nos pen­sées, nos idées, nos sen­sa­tions, nos affects, nos théo­ries, nos décou­vertes, nos inven­tions ; in fine d’où nous vient le désir.
S’il faut deux gamètes, l’une mâle et l’autre femelle pour faire un bébé, il faut aus­si un 3ème terme qui s’exprime par l’action de les réunir, de les incar­ner. Il a pour nom, le désir. Les pro­pos tenus au cours de cette confé­rence montrent que si le vivant réunit deux ten­dances pul­sion­nelles élé­men­taires, dite de mort et de vie, il faut aus­si un 3ème terme qui inter­vienne du début à la fin du tra­jet que nous avons explo­ré, pour accom­plir une recherche et abou­tir à des pro­po­si­tions nou­velles. Il s’agit encore du désir, subli­mé en épis­té­mo­phi­lie.

Ber­nard Cher­vet

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English ver­sion

I would like first to thank you for your invi­ta­tion which is an honor for me. Thank you to Brian O’Neill and all the mem­bers of the Scien­ti­fic Com­mis­sion, as well as to Rosine Per­el­berg, your Pre­sident, with whom I have enjoyed a friend­ly and good wor­king rela­tion­ship for many years. Only last week we ran a webi­nar in French toge­ther !
I regret that I have to speak to you from France, since this deprives me of being in Lon­don, in your com­pa­ny. Howe­ver, I will take advan­tage of this situa­tion to stress that the acti­vi­ty of thin­king at a dis­tance is undoub­ted­ly excellent from the point of view of idea­tion and emo­tions, but it lacks the other part of thin­king that takes into account sen­so­ry per­cep­tion. This is the rea­son why during remote ses­sions there is some­times intense psy­chic acti­vi­ty, and even an appeal to the hal­lu­ci­na­to­ry realm, in order to fur­nish mate­rials in “per­cep­tual iden­ti­ty” to respond to the lack of per­cep­tion. We miss the tan­gible dimen­sion.
I fear that this remote solu­tion will draw your atten­tion even more to the major defects of my pro­nun­cia­tion and my dif­fi­cul­ties to leave my mother tongue in favour to yours. A conso­la­tion would consist in insis­ting on the “char­ming French accent” and on the fact that it is my “mother” who does not want to let go. A meagre conso­la­tion !

But kno­wing that you will be able to read my text while lis­te­ning to me gives me hope that you will be for­bea­ring. Thank you so much.
This chal­lenge you are pre­sen­ting me with this eve­ning, and which I am most willing to meet, is a good illus­tra­tion of the topic I want to speak about. Expo­sing one’s thin­king to others, espe­cial­ly when they are bene­volent, implies the risk of expe­rien­cing fee­lings of lack without which there would be no pro­gress. The famous “drive for impro­ve­ment” which Freud rejec­ted as such, cer­tain­ly has its ori­gins here. Spea­king to you in English, and remo­te­ly, thus exa­cer­bates the fee­lings of lack with their trau­ma­tic back­ground. I could have decli­ned your invi­ta­tion. But we know how self-inhi­bi­tion is a culture of self-idea­li­za­tion. On the other hand, pre­sen­ting one’s thin­king to others, implies sub­mit­ting one­self to the ordeal of lack, the­re­by making pro­gres­sion pos­sible. A research pro­ject is only fina­li­zed by its publi­ca­tion and the test of sha­ring. The same is true of theo­ry. Freud, and then Bion, taught us that theo­ry must be pushed to its limits, until it suc­cumbs to rea­li­ty-tes­ting, until it itself is found to be wan­ting and makes way for ano­ther. Accep­ting the neces­si­ty of expe­rien­cing fee­lings of lack is at the basis of all evo­lu­tion. I will come back to the link bet­ween these fee­lings, the fact of see­king and its des­ti­ny as research.

The inter­na­tio­nal health situa­tion faces us cur­rent­ly, in an almost expe­ri­men­tal way, with such fee­lings in direct connec­tion with the trau­ma­tic state pro­vo­ked by the Coro­na­vi­rus and by the break­down of the denial of pan­de­mics in which our Wes­tern coun­tries were living. The last pan­de­mic taken into account in the West has taken on mythi­cal pro­por­tions : it was the Spa­nish flu’. The fur­ther other epi­de­mics pas­sed unno­ti­ced, or were consi­de­red as ill­nesses that concer­ned other conti­nents. This situa­tion could faci­li­tate an opti­cal illu­sion inso­far as the fee­lings of lack and the trau­ma­tic expe­riences are imme­dia­te­ly attri­bu­ted to an objec­ti­fiable exter­nal cause. The lack of know­ledge concer­ning the virus and the inabi­li­ty to cure the ill­ness, have given rise to colos­sal research stu­dies. Thus the cur­rent context is in line with our topic, research, with its sources and the psy­chic move­ment that consists in see­king which is at the ori­gin of what we call “research”. The cur­rent cir­cum­stances have given rise to a large quan­ti­ty of stu­dies and research in all the domains, since many articles, forums and books have been publi­shed, pro­du­ced by many psy­cho­ana­lysts throu­ghout the world. I have been par­ti­cu­lar­ly inter­es­ted in thin­king about the modi­fi­ca­tions that this situa­tion has brought about in our prac­tice, and thin­king by rever­be­ra­tion about the role of the pair per­cep­tion-repre­sen­ta­tion in ses­sions, a pair that usual­ly goes unno­ti­ced and remains silent in the set­ting. This approach makes it easier to tackle a topi­cal ques­tion in the psy­cho­ana­ly­tic field, that of remote ana­ly­sis com­pa­red with ana­lyses in each other’s pre­sence. The ques­tion of the role, but also the func­tion of the direct sen­so­ry per­cep­tion of the other per­son, owing to his pre­sence, is not a tri­vial mat­ter. There is a gap bet­ween this sen­so­ry per­cep­tion and its repre­sen­ta­tion. Sen­so­ry per­cep­tion requires other modes of func­tio­ning from men­tal life than those used during remote ana­lyses, which above all, deve­lops psy­cho autoe­ro­tisms. It is the­re­fore not pos­sible to say that a remote ana­ly­sis is equi­va­lent to an ana­ly­sis in each other’s pre­sence. This opens up an area of research on per­cep­tion, on the fact that at the level of per­cep­tion there is some­thing that can­not be approa­ched through idea­tion and emo­tions. This gap bet­ween per­cep­tion and, idea­tion and emo­tion, can­not be eli­mi­na­ted by the hal­lu­ci­na­to­ry crea­tion of per­cep­tual iden­ti­ties. On the other hand, thanks to per­cep­tual iden­ti­ty, the dream-work satu­rates inter­nal per­cep­tion which allows for the rest obtai­ned through sleep ; hence the dreamer’s convic­tion that there is only one world, that of dreams. Idea­tion and per­cep­tion are but one during the time of drea­ming thanks to per­cep­tual iden­ti­ty. But then we wake up.

I will the­re­fore not fol­low this sim­pli­fi­ca­tion that the cur­rent situa­tion offers us, pre­fer­ring ins­tead to turn towards what ini­tiates research, that is the need to search as it appears for rea­sons within the mind without neces­sa­ri­ly being indu­ced by a trau­ma­tic exter­nal agent.
My dis­cus­sion places fee­lings of lack and under­lying trau­ma­tic fee­lings at the ori­gin of a first stage which consists in see­king, and which may later turn into an acti­vi­ty of research. The “re” finds its jus­ti­fi­ca­tion here : search-research ; find – refind.
So-cal­led trau­ma­tic situa­tions, which are objec­ti­fiable and exter­nal to the resear­cher, are cor­re­la­ted with his fee­lings of lack of endo­ge­nous ori­gin. The source comes from the fee­lings that are more or less arou­sed by exter­nal cir­cum­stances, such as absences, des­truc­tions, losses and disap­pea­rances.
You will be fami­liar with the famous skit of two clowns. Auguste is on stage. He is tur­ning in circles in the glare of the spot­lights ; he seems to be loo­king for some­thing. The white clown arrives, looks at him and asks him what he is doing. Auguste replies that he is loo­king for some­thing ; “What?”, the other clown asks him. “My watch”. The white clown then asks him if he is sure that he lost it here. “No”, Auguste replies. “So why are you loo­king for it here?” “Because there is light”!

This lit­tle sto­ry pre­sents us with a man who is see­king, the desi­gna­tion of an object sought that is sup­po­sed to be a lost object, and the place of the search. Beyond the conflict bet­ween light and dark­ness there is the conflict bet­ween exis­ting and disap­pea­ring which is at the basis of the infan­tile pho­bia of dark­ness.
The watch turns out to be the child him­self who fears disap­pea­ring in the dark­ness. This takes us back to the Fort-Da, to infan­tile pho­bias and the play which consists in crea­ting one’s own  anti-trau­ma­tic pro­cesses of restraint. This acti­vi­ty of playing is neces­sa­ry for esta­bli­shing the psy­chic work that makes it pos­sible to men­tal­ly pro­cess sepa­ra­tions and expe­riences of mour­ning.

I have alrea­dy refer­red seve­ral times to see­king, resear­ching and theo­ri­zing without spea­king of science. All these terms refer to dif­ferent fields. Cur­rent­ly, I focus on the need to seek, in fact on the need to seek and to find in order to be able to pro­duce cau­sal theo­ries that link trau­ma­tic fee­lings to tan­gible objects. These objects will hen­ce­forth be des­cri­bed as trau­ma­tic. These theo­ries pro­vide expla­na­tions whose func­tion is to dimi­nish fee­lings of menace and disap­pea­rance. They trans­form the vague impres­sions of lack into a fee­ling that some­thing is lacking. That is sup­po­sed to put an end to the lack, and at least represent it and explain its advent. The theo­ry of the pri­mal phan­ta­sy of being cas­tra­ted by the father is typi­cal of this need for expla­na­to­ry theo­ries.
When “fin­ding” does not occur, a com­pul­sion to repeat sets in to seek. As for focu­sing on an object, it can give rise to a quest which turns towards an unat­tai­nable, unre­pre­sen­table, ideal object ; such as the quest for the Holy Grail and the philosopher’s stone.

These found objects will be cho­sen as objects of a research, for ins­tance, concer­ning the object-choice, the choice of an ana­lyst by the patients, etc. The act of see­king, of fin­ding a cho­sen object and of theo­ri­zing a cau­sa­li­ty bet­ween the fee­lings and the cho­sen objects, forms the basis for a restraint. On this basis, the mind can deve­lop, and pro­duct various invest­ments inclu­ding that of research. This is the func­tion of the infan­tile sexual theo­ries.
The fact that this search becomes scien­ti­fic requires ano­ther stage, a rea­li­ty-tes­ting that always remains enig­ma­tic from the point of view of psy­chic func­tio­ning. All the solu­tions pro­po­sed by Freud were suc­ces­si­ve­ly aban­do­ned by him­self. This tes­ting occurs in seve­ral stages which have to be rec­ti­fied each time a new para­me­ter appears.

In this way the fee­lings of lack will create a need to find some­thing that offers the pos­si­bi­li­ty of over­co­ming this state ; this need under­pins the fact of see­king it, fin­ding it or crea­ting it. We are all fami­liar with Picasso’s words : “I do not seek, I find” clear­ly stres­sing the urgen­cy of fin­ding. We have, then, the series : see­king, fin­ding, crea­ting. What is found is not yet a dis­co­ve­ry, but an ele­ment of rea­li­ty which may give rise sub­se­quent­ly to a dis­co­ve­ry. This ele­ment par­ti­ci­pates first in a func­tion of restraint. From the point of view of this anti-trau­ma­tic func­tion of see­king-fin­ding, we can say that eve­ry dis­co­ve­ry depends on seren­di­pi­ty, chance and ran­dom­ness. What is sought after, fun­da­men­tal­ly, is to put an end to trau­ma­tic expe­rience.
See­king, then, is first and fore­most a way of respon­ding to trau­ma­tic fee­lings lin­ked to anxie­ty concer­ning one’s own disap­pea­rance, by sear­ching for what might make it pos­sible to resolve this ter­ror, gene­ral­ly concea­led under fee­lings of lack.

Let us turn now to these trau­ma­tic fee­lings. Ini­tial­ly, Freud asso­cia­ted fee­lings of lack with the repres­sed. For him it was a mat­ter of com­ple­ting infan­tile amne­sia on the model of Mendeleev’s per­iod table, but also of redis­co­ve­ring through regres­sion past expe­riences mar­ked by a trau­ma­tic qua­li­ty, per­cep­tions of ear­ly sexual seduc­tion, and then pre­co­cious mani­fes­ta­tions of infan­tile sexua­li­ty. In his fol­lo­wing concep­tion, dream regres­sion is sup­po­sed to per­mit the return to an abso­lute state of nar­cis­sism, that of the phan­ta­sy of retur­ning to the mother’s womb and to intra-ute­rine life, the mother being concer­ned to pro­tect her child from sexua­li­ty which returns from the out­side via the sexual father. In both cases, the trau­ma­tic comes from the sexual, lack resul­ting from the fact of not suc­cee­ding in repres­sing the sexual or in eli­mi­na­ting it. Without being false, both these concep­tions will have to fol­low an inter­na­li­za­tion of the ori­gin of the trau­ma­tic qua­li­ty. This proves to be a qua­li­ty that is inter­nal to the drive, and not infan­tile sexua­li­ty that has been awa­ke­ned to objec­ta­li­ty too soon, nor sexua­li­ty that menaces abso­lute nar­cis­sism. This cha­rac­ter inherent to eve­ry drive is their most ele­men­ta­ry regres­sive ten­den­cy, their ten­den­cy to return to an ear­lier state of things, even to the inani­mate and inor­ga­nic state. We once again find the expe­riences of ter­ror and disap­pea­rance inso­far as they reflect this pri­ma­ry ten­den­cy of eve­ry drive, whe­ther it is a life drive or death drive. It is an extinc­tive ten­den­cy which I call extinc­tive regres­si­vi­ty. It is in rela­tion to this ten­den­cy that the need emerges to esta­blish an act of restraint. This aim will be ful­filled by see­king, fin­ding and esta­bli­shing a cau­sal theo­ry bet­ween the trau­ma­tic expe­riences and the cho­sen per­cei­ved objects. This restraint forms the basis of psy­chic evo­lu­tion by pre­ven­ting imme­diate extinc­tion. It is at the ori­gin of the desire and thought that unfolds against a back­ground of pri­ma­ry maso­chism pro­du­ced by the ten­sion of restraint.

Research and theo­ry are thus means of respon­ding to this extinc­tive ten­den­cy, to its trau­ma­tic urgen­cy, hence the convic­tion that accom­pa­nies them. This convic­tion is trans­fer­red to the theo­ries and dis­co­ve­ries at the moment when they are pro­du­ced with the aim of ensu­ring a satu­ra­tion of conscious­ness along the inter­nal path. The new dis­co­ve­ry is always expe­rien­ced as the mis­sing piece, the mis­sing link in the chain. The “Eure­ka” moment is this truth-effect to which the resear­cher adheres for inner rea­sons. It is only sub­se­quent­ly that this act of restraint may become a wish for know­ledge, an appe­tite for, or more sim­ply, curio­si­ty about things which have first been found out of neces­si­ty and uti­li­zed for anti-trau­ma­tic pur­poses thanks to the recourse to sen­so­ry per­cep­tion.
We are remin­ded here of the logics of the trau­ma­tic neu­roses and their attempts to find psy­chic solu­tions through clin­ging to the per­cep­tion of tan­gible rea­li­ties that can give rise to traces, and then psy­chic contents. These rea­li­ties are per­cei­ved at the moment when the trau­ma­tic qua­li­ty has been felt. Freud cal­led them “clo­se­ly rela­ted” (1937) rea­li­ties. A rela­tion­ship of restraint is thus esta­bli­shed bet­ween this qua­li­ty and the clo­se­ly rela­ted rea­li­ties.

It was only in 1923 that Freud reco­gni­zed this func­tion of per­cep­tion which offers the pos­si­bi­li­ty of esta­bli­shing a clin­ging which involves a restraint. In The Ego and the Id he writes that “any­thing ari­sing from within (apart from fee­lings) that seeks to become conscious must try to trans­form itself into exter­nal per­cep­tions” (S.E. 19:20). He thus makes trans­po­si­tion the basic mecha­nism of the deve­lop­ment of the mind and of beco­ming conscious ; but also the mecha­nism which makes it pos­sible to create the tools for acqui­ring know­ledge of the exter­nal world. You will all recall his short sta­te­ment of 1939 in which he places trans­po­si­tion at the ori­gin of the notion of spa­tia­li­ty. I will quote him : “Space may be the pro­jec­tion of the exten­sion of the psy­chi­cal appa­ra­tus. No other deri­va­tion is pro­bable. Ins­tead of Kant’s a prio­ri deter­mi­nants of our psy­chi­cal appa­ra­tus. Psyche is exten­ded ; knows nothing about it” (S.E 23 : 300). The same logic can be deployed with the notion of time through the dis­con­ti­nui­ty and inter­mit­tence of the mind which knows nothing about it. The uncons­cious qua­li­ties of the mind are thus trans­po­sed on to exter­nal rea­li­ty. Hence the first ani­mis­tic appre­hen­sion of the world through is crea­ted through meta­phors. Their inter­na­li­za­tion and uti­li­za­tion by dreams makes it pos­sible to pro­duce psy­chic regis­tra­tions.
This tra­jec­to­ry, ari­sing from a need of the mind to respond to trau­ma­tic fee­lings of lack, is at the basis of a uti­li­za­tion of the per­cep­tion of the exter­nal world and the­re­by of a first apper­cep­tion of the world. Next a dif­fe­ren­tia­tion will be made bet­ween what belongs to the exter­nal world and what belongs to the mind. The sciences find their place on this psy­chic tra­jec­to­ry. They take advan­tage of this need to uti­lize the exter­nal world. Know­ledge of the world is a by-pro­duct, a recog­ni­tion. On the other hand, recog­ni­tion of the rea­li­ty of the mind makes it neces­sa­ry to fol­low this path. Psy­cho­ana­ly­sis is a secon­da­ry science com­pa­red with the know­ledge of exter­nal rea­li­ty.
To gain access to the rea­li­ty of the mind, this tra­jec­to­ry itself must be taken into account. It begins with an ini­tial trans­po­si­tion, then a meta­pho­ri­za­tion, then the dream work whose inter­pre­ta­tion makes it pos­sible to achieve recog­ni­tion of uncons­cious wishes and, by deduc­tion, of the regres­sive attrac­tion of the extinc­tive ten­den­cies.

You will reco­gnize here the very tra­jec­to­ry Freud fol­lo­wed. Each time he took into account new cli­ni­cal ele­ments, he wrote a new contri­bu­tion to his theo­ry of dreams, the Traum­deu­tung.  To become a science, the rea­li­ties of this tra­jec­to­ry will them­selves have to be consi­de­red as spe­ci­fic objects and desi­gna­ted within a cor­pus of concepts that ren­ders them intel­li­gible.
It is here that psy­cho­ana­ly­tic epis­te­mo­lo­gy dif­fers from the more clas­si­cal epis­te­mo­lo­gy of the sciences, in par­ti­cu­lar of posi­ti­vism. Psy­cho­ana­ly­sis dis­co­ve­red beyond the posi­ti­vi­ty of the psy­chic contents invol­ved in men­tal func­tio­ning, beyond the posi­ti­vi­ty of the nega­ti­vi­ty of the uncons­cious, an ins­tinc­tual drive qua­li­ty that does is not part of posi­ti­vism since it tends on the contra­ry to make it disap­pear.
This trans­po­si­tion on to exter­nal rea­li­ties thanks to sen­so­ry per­cep­tions is a detour via the other and via the exter­nal world, inclu­ding one’s own body. In this case, the trans­po­si­tion is cal­led a conver­sion, a term for­ged by Freud. These trans­po­si­tions also allow for the uti­li­za­tion of this other through iden­ti­fi­ca­tion (the Neben­mensch, the per­sons on whom autho­ri­ty is confer­red, the ana­lyst and the trans­fe­rence of autho­ri­ty).

This detour is at the ori­gin of the dis­co­ve­ry and recog­ni­tion of the exter­nal world in various ways that are not all scien­ti­fic. The extinc­tive ten­den­cy will be trans­po­sed on to the exter­nal world, on to the tan­gible realm that gives rise to traces and idea­tion, but also on to non­tan­gible rea­li­ties, the absences, losses and disap­pea­rances which can­not give rise to traces, idea­tion or fee­lings and require the uti­li­za­tion of contents pro­du­ced from what is tan­gible, contents that are the­re­fore not spe­ci­fic to per­cep­tions that do not give rise to traces. It is the fact that the pro­cess of human thought is bipha­sic that reflects and proves their exis­tence. In order to oppose the extinc­tive regres­sive ten­den­cies, the contents ari­sing from tan­gible rea­li­ty will them­selves have to fol­low a regres­sive tra­jec­to­ry and par­ti­ci­pate in a work of regis­te­ring these traces as psy­chic regis­tra­tions. The contents uti­li­zed for restraint must be drea­med before they can be used to reco­gnize the world as such. It is thus only sub­se­quent­ly, after the first stage of restraint and the inter­val per­iod of drea­ming have been rea­li­zed, that research into the objects of the world that have first been sought-found, and then drea­med, and which have become objects to be dis­co­ve­red, objects of research, can take place.

The second stage, more or less freed from psy­chic neces­si­ties, is a time of open­ness to the world and of dis­co­ve­ry, of redis­co­ve­ry and recog­ni­tion. Research work thus takes plus in seve­ral stages : loo­king for a mate­rial that per­mits the esta­blish­ment of restraint, inter­na­li­zing this mate­rial and uti­li­zing it through drea­ming in order to respond to the extinc­tive regres­sive ten­den­cies, then pro­mo­ting the desire to cathect the world, to get to know it, to appre­ciate it, to trans­form it and to modi­fy it by crea­ting new ele­ments so that the world after is no lon­ger the same as the world before.

This pro­cess in two stages, the pro­cess of après-coup, ini­tial­ly ful­fils a  psy­chic func­tion of restraint, then it accom­mo­dates the dream work which pro­duces psy­chic regis­tra­tions, in par­ti­cu­lar thing-pre­sen­ta­tions, and final­ly it ela­bo­rates contents capable of beco­ming conscious on the basis of which eve­ry­thing that man is capable of crea­ting out of plea­sure, curio­si­ty, relief, avoi­dance, pro­tec­tion, the wish to orga­nize the world and respond to what remains mys­te­rious, can be deployed, giving rise to the arts, reli­gions, ideo­lo­gies, sciences, poli­tics and also ins­ti­tu­tions. All these fields of culture are mar­ked by the fact that they were ori­gi­nal­ly psy­chic for­ma­tions that were sub­se­quent­ly deployed as spe­ci­fic domains.

Psy­cho­ana­ly­sis has modi­fied the epis­te­mo­lo­gy of the sciences by intro­du­cing drea­ming and its inter­pre­ta­tion, but also by taking into account the func­tion of drea­ming and the func­tion of inter­pre­ta­tion with regard to the ele­men­ta­ry rea­li­ty of eve­ry drive, name­ly its trend towards its own disap­pea­rance, its extinc­tion. For psy­cho­ana­ly­sis, the tra­jec­to­ry of “lear­ning” (connais­sance)1  includes a detour via for­ma­tions that first of all ensure mis­re­cog­ni­tion (mécon­nai­sance). It is not only a mat­ter of a lack of know­ledge (savoir), com­mon to all the sciences, but of the neces­si­ty of taking into account these extinc­tive ten­den­cies and of sub­jec­ting them to concealment before being able to deduce their exis­tence by means of an inter­pre­ta­tion. Know­ledge also has the func­tion of denying the part of rea­li­ty that becomes an unat­tai­nable truth. Science is not only a lack of know­ledge that has to be com­ple­ted, a series of errors that have to be rec­ti­fied ; it is also a body of know­ledge which is lacking truth. “Lear­ning” (connais­sance) fol­lows a tra­jec­to­ry of see­king truth which it must relin­quish in order to become a body of know­ledge.

Many debates have revol­ved around the ques­tion of kno­wing whe­ther or not psy­cho­ana­ly­sis is a science, with the ten­den­cy to want to force psy­cho­ana­ly­sis to fit in with the clas­si­cal defi­ni­tion of the sciences. In fact, psy­cho­ana­ly­tic epis­te­mo­lo­gy includes drea­ming and inter­pre­ta­tion, which should lead us rather to recon­si­der the very defi­ni­tion of the sciences. All scien­ti­fic ela­bo­ra­tion thus has two sides to it : an advance in the always incom­plete field of know­ledge and a psy­chic for­ma­tion, a concep­tion that has the func­tion of attemp­ting to ful­fil wishes for com­ple­te­ness and of esca­ping or denying the exis­tence of the inner trau­ma­tic qua­li­ty.
You will not be sur­pri­sed, then, if the crea­tion of an orga­ni­za­tion dedi­ca­ted to research fol­lows the same dyna­mic that I have just des­cri­bed and is concer­ned by the two sides of seeking/searching and resear­ching. The mate­ria­li­za­tion of such an orga­ni­za­tion ful­fils the dif­ferent func­tions dis­cus­sed above and is also an enact­ment of concep­tions concer­ning research that can both pro­mote and limit it.

Within the Paris Psy­cho­ana­ly­ti­cal Socie­ty, when I was its pre­sident, I encou­ra­ged and par­ti­ci­pa­ted in the crea­tion of such an organ. Of course, the SPP has a Scien­ti­fic Com­mitte and a Scien­ti­fic and Tech­ni­cal Coun­cil. But their func­tion is not to be sites of research, but rather to eva­luate inter­nal scien­ti­fic life and to encou­rage it within the Socie­ty.

The Com­mis­sion for Research and Deve­lop­ment of Psy­cho­ana­ly­sis (the CRDP) emer­ged out of nume­rous other more or less for­mal groups that all had research in psy­cho­ana­ly­sis as their aim without being sites dedi­ca­ted to it. The terms that desi­gnate this CRDP make up the first lines of the sta­tutes of the SPP. These groups ope­ra­ted within the ins­ti­tu­tion but without being accor­ded any par­ti­cu­lar recog­ni­tion. There was no cen­sor­ship of such ini­tia­tives, but there was a cer­tain ambi­va­lence about accor­ding them a spe­ci­fic sta­tus, under the pre­text that all semi­nars are consi­de­red to be places of research. The SPP did not the­re­fore have an organ of research and reflec­tion on research. During my two man­dates the pro­ject thus emer­ged of crea­ting such an organ whose aim would be to seek and research, a per­ma­nent and open com­mit­tee without a hie­rar­chy that would be concer­ned spe­ci­fi­cal­ly with research and deve­lop­ment in psy­cho­ana­ly­sis, that would ini­tiate research pro­jects, wel­come them, and engage in meta­psy­cho­lo­gi­cal and epis­te­mo­lo­gi­cal reflec­tion on research itself. The CRDP was thus foun­ded. Cur­rent­ly this acti­vi­ty is part of the pro­gramme, but not inclu­ded in the rules of the SPP by the Coun­cils that suc­cee­ded me. This remark invites ano­ther. Research has its sources in extra-ter­ri­to­ria­li­ty in rela­tion to nar­cis­sism, which is also true of ins­ti­tu­tions.

The CRDP took these ele­ments into account in orga­ni­zing itself. It is open to all mem­bers. It is made up of various research work­shops which are lin­ked to a ple­na­ry space. This is the place of pre­sen­ta­tion, sha­ring and com­pa­ri­son of the pro­jects car­ried out in the work­shops but also of the more indi­vi­dual pro­jects of mem­bers of the Socie­ty, and even of the pro­jects of other scien­tists who have occa­sion to work with psy­cho­ana­lysts of the SPP. It also regu­lar­ly devotes ple­na­ry ses­sions to reflec­tion on what is going on within it and on even­tual links bet­ween what is going on and its mis­sion, research. These per­iods of reflexi­vi­ty on the pro­cesses that take place in the Com­mis­sion of Research endea­vor to take account of the fact that, like any other orga­ni­za­tion, it has contai­ned since its crea­tion concea­led ele­ments, impli­cit theo­ries about research, theo­ry and science, which over­de­ter­mine the work that is car­ried out there, both nou­ri­shing it and limi­ting it.
The CRDP allows for inter­play bet­ween the indi­vi­dual and col­lec­tive spheres. The work­shops are crea­ted around a theme free­ly cho­sen by the small num­ber of people who form the work­shop and who also choose them­selves free­ly. This work in small non­hie­rar­chi­cal teams favours outs­tan­ding and inci­sive indi­vi­dual contri­bu­tion.

As for the col­lec­tive sphere, it is situa­ted on seve­ral levels. First of all, the ple­na­ry ses­sion which brings toge­ther inter­es­ted col­leagues who are cri­ti­cal, ambi­va­lent and bene­volent. Ano­ther level is that of all the mem­bers of the socie­ty who know of the exis­tence of the CRDP but who are either indif­ferent hos­tile or favou­rable to it, but pre­fer to remain out­side it. Final­ly, of course, the stu­dies are pre­sen­ted to the out­side world through diverse indi­vi­dual and col­lec­tive publi­ca­tions.

This inter­play bet­ween the indi­vi­dual and col­lec­tive spheres is not without echoes in the his­to­ry of the sciences with the often sur­pri­sing vicis­si­tudes of peer inte­gra­tion, the dif­fu­sion and vul­ga­ri­za­tion of science. How these scien­ti­fic dis­co­ve­ries become objects of culture or a mass cultu­ral resource remains a mys­te­ry that can­not be control­led, invol­ving all sorts of dis­tor­tions, misun­ders­tan­dings, false pater­ni­ties, pas­sions, hopes and idea­li­za­tions. It is also the his­to­ry of omis­sions and banish­ments (Gali­leo, of course). An “office for lost and found ideas” has been sug­ges­ted, without it being pos­sible to say which will fol­low a path of fal­ling into laten­cy, announ­cing their future return, and which will be defi­ni­tiv­ly era­sed.
The example of the laws of ther­mo­dy­na­mics offers a per­fect sche­ma of the orga­ni­za­tion in two stages of the inte­gra­tion of scien­ti­fic dis­co­ve­ries and advances. The law known as the first law was dis­co­ve­red 40 years after the so-cal­led second law. The lat­ter suf­fe­red the fate of disap­pea­ring and only ree­mer­ged after the accep­tance of the law known as the first law. The law which was dis­co­ve­red first was Carnot’s law which asser­ted that all work is accom­pa­nied by a loss of ener­gy. Joule’s law, dis­co­ve­red 40 years later, which became the first law, is a law of equi­va­lence asser­ting that eve­ry­thing is trans­for­med and nothing is lost, thus coin­ci­ding with the prin­ciple of Lavoi­sier, which itself ori­gi­na­ted in the Greek phi­lo­so­phy of Anaxa­go­ras. The prin­ciple of equi­va­lence denies loss. It was imme­dia­te­ly accep­ted and pla­ced first.
Psy­chic logics are invol­ved in this bipha­sic dyna­mic of disap­pea­rance and resur­gence. The coding of the two laws has retai­ned the trace of this symp­to­ma­tic dyna­mic.

To conclude, the mon­tage that I have just pre­sen­ted to you has taken into account the dif­ferent para­me­ters that make up a com­plex path regress and pro­gress : trans­po­sing, see­king, fin­ding, drea­ming, resear­ching, dis­co­ve­ring, sha­ring… offe­ring des­ti­ny group and mas­sive logics.
From the psy­chi­cal point of view the sources of research are in extra­ter­ri­to­ria­li­ty. See­king-fin­ding has the pri­ma­ry aim of esta­bli­shing an act of restraint (“taming”) towards an inter­nal rea­li­ty that we have to ignore first then to use and to deduce after­ward. Enri­ching the nar­cis­sism of science is a second aim through which our desires for know­ledge, lear­ning, dis­co­ve­ring and inven­ting can be satis­fied, all of which ori­gi­nate in our desire to give birth and in that of kno­wing how babies are made –  a desire subli­ma­ted in the form of ano­ther curio­si­ty : How do thoughts, ideas, theo­ries, dis­co­ve­ries and inven­tions come to us ? Where does our desire come from ?
If two gametes, one male and the other female, are nee­ded to make a baby, a 3rd term is also neces­sa­ry which is expres­sed through the action of uni­ting them, of embo­dying them. Its name is desire. The remarks I have made during this talk, show that if all living things unite two ele­men­ta­ry drive ten­den­cies, those of life and death, a third term is also neces­sa­ry which inter­venes from the begin­ning until the end of the tra­jec­to­ry that we have explo­red in order to accom­plish research and arrive at new pro­po­si­tions. It is once again a mat­ter of desire, but subli­ma­ted in the form of epis­te­mo­phi­lia.

Ber­nard Cher­vet

 

NOTES :

  1. This dis­tinc­tion bet­ween connais­sance (lear­ning) and savoir (know­ledge) is made by  J.-F. Lyo­tard in his book The Post­mo­dern Condi­tion : A Report on Know­ledge. Man­ches­ter : Man­ches­ter Uni­ver­si­ty Press, p. 18