Violences – Contours et détours : un point de vue psychanalytique

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Si cela était encore néces­saire, il suf­fi­rait de lire quelques titres de quo­ti­diens, d’écouter la radio ou de regar­der les actua­li­tés télé­vi­sées pour être assu­ré qu’un monde de vio­lences per­ma­nentes (vio­lences au plu­riel) nous entoure au quo­ti­dien. Qu’elles soient sociales, éco­no­miques et / ou poli­tiques, ces vio­lences conduisent à des révo­lu­tions comme à des guerres, autant de conflits qui ont orga­ni­sé l’épopée des Civi­li­sa­tions, ain­si que la grande His­toire de l’humanité, de ses ori­gines loin­taines à aujourd’hui.

Cepen­dant, abor­der le thème de la vio­lence, ses contours et ses détours, sur un plan psy­cha­na­ly­tique, et plus spé­ci­fi­que­ment méta­psy­cho­lo­gique, nous met dans une dif­fi­cul­té, car, si le terme vio­lence a une impor­tance pri­mor­diale sur le plan de la dyna­mique et de l’économie des méca­nismes qui régissent le fonc­tion­ne­ment psy­chique, pour autant, la vio­lence n’est pas, en elle-même un concept méta­psy­cho­lo­gique.
En effet, sous le vocable vio­lence (qui a une valeur séman­tique très riche) peuvent se regrou­per (de manière assez aléa­toire) toute une série de concepts psy­cha­na­ly­tiques qui peuvent s’intriquer, comme se recou­per, et qui vont de l’agressivité, de l’ambivalence, de la cruau­té, du sadisme, de la haine, et de l’emprise, etc., aux pul­sions de des­truc­tion.
A ceci doivent être rajou­tées des notions plus des­crip­tives concer­nant des états psy­chiques (affec­tifs et émo­tion­nels) tels que (je les cite par ordre alpha­bé­tique) : l’animosité, l’ardeur, la brus­que­rie, la colère, la déme­sure, la démence (l’hybris), l’énergie, l’effort, l’emportement, l’excès, la fureur, l’impétuosité, l’impulsivité, la pas­sion, la puis­sance, la rage, la véhé­mence, la viru­lence, etc.

Après cette énu­mé­ra­tion (qui est loin d’être exhaus­tive) on peut, à pre­mière vue, se rendre compte que s’il y a des termes qui pour­raient dési­gner des états dont on pour­rait pen­ser qu’ils peuvent être l’expression d’un poten­tiel désor­ga­ni­sa­teur de la psy­ché, néan­moins ceux-ci font plei­ne­ment par­tie d’éléments consi­dé­rés comme poten­tiel­le­ment orga­ni­sa­teurs de la psy­ché, comme, par exemple, la haine.
Si j’avance que la vio­lence n’est pas un concept méta­psy­cho­lo­gique c’est dans la mesure où, sui­vant la pen­sée de S.Freud, celui-ci se réfère le plus sou­vent, d’une part, dans la pre­mière théo­rie des pul­sions à ce qui est de l’ordre de l’agressivité, comme, d’autre part, dans la seconde théo­rie des pul­sions (dite encore ‘seconde méta’), à ce qui est de l’ordre de la des­truc­ti­vi­té, ain­si qu’aux pul­sions dites de des­truc­tion.

En effet, si S.Freud est bien conduit à se réfé­rer et à uti­li­ser le mot ‘vio­lence’ à bien des reprises dans ses écrits [je crois que l’on recense plus de cent réfé­rences], ce n’est cepen­dant que dans un texte tar­dif –  sa réponse à A.Einstein, Pour­quoi la guerre ? (texte de 1933) – qu’il s’appuie de manière pré­pon­dé­rante sur ce terme, je le cite :
« Vous m’avez sur­pris, écrit-il à A. Ein­stein, en me sou­met­tant cette ques­tion : que peut-on faire pour détour­ner des hommes la fata­li­té de la guerre ? Le sen­ti­ment de ma propre incom­pé­tence – ose­rai-je dire de la nôtre – m’effraya tout d’abord, car cela m’apparut être une tâche pra­tique qui échoit aux hommes d’Etat. […] Vous com­men­cez par les rela­tions du droit avec le pou­voir. C’est à coup sûr le point de départ qui convient à notre inves­ti­ga­tion. Ose­rais-je rem­pla­cer le mot ‘pou­voir’ par celui, plus cru et plus dur, de ‘vio­lence’ ? »
Plus loin S.Freud illustre le sens qu’il donne à l’utilisation qu’il fait du terme ‘vio­lence’ comme étant, pour lui, en étroite cor­ré­la­tion avec l’idée de ‘pou­voir’ ; ain­si, entre autres, peut-on rele­ver dans ce même texte les cita­tions sui­vantes : « Les conflits d’intérêt entre les hommes sont donc fon­da­men­ta­le­ment tran­chés par le recours à la vio­lence » ; « Les lois […] déter­minent alors à quelle quan­ti­té de liber­té per­son­nelle, dans l’usage de sa force comme vio­lence, l’individu doit renon­cer pour per­mettre la sécu­ri­té de la vie en com­mun. » ; « C’est une grave erreur de cal­cul de ne pas consi­dé­rer que le droit n’était à l’origine que vio­lence à l’état brut, et qu’il ne peut non plus, de nos jours, se pas­ser de sou­tien de la vio­lence. », etc.

En fait, dans ce texte, l’emploi du terme ‘vio­lence’ est conçu par S.Freud dans une double dimen­sion, essen­tielle sur le plan psy­cha­na­ly­tique :
– d’une part, celle de la force, mais pas de n’importe quelle force, puisqu’il s’agit de celle qui se réfère à la seule pul­sion (la force pul­sion­nelle), et,
– d’autre part, de la pul­sion dans sa dimen­sion des­truc­trice (pul­sion de des­truc­tion, ou pul­sion de mort) ; je cite : « Les pul­sions de l’homme ne sont que de deux sortes : soit celles qui visent à conser­ver et à unir – nous les nom­mons éro­tiques, tout à fait dans le sens de l’Eros dans Le Ban­quet de Pla­ton, ou sexuelles par une exten­sion consciente du concept popu­laire de sexua­li­té –, et d’autres, qui visent détruire et à tuer. Nous regrou­pons celles-ci sous le terme de pul­sions d’agression ou pul­sion de des­truc­tion ».

Cepen­dant il faut remar­quer que S.Freud n’a pas atten­du la seconde théo­rie des pul­sions (c’est-à-dire ce que nous appe­lons com­mu­né­ment le « tour­nant théo­rique de 1920 ») pour prendre en consi­dé­ra­tion tout ce qui du res­sort de l’agressivité, laquelle implique l’idée d’une vio­lence en acte qui se déploie psy­chi­que­ment sous dif­fé­rentes formes – tout autant orga­ni­sa­trices que désor­ga­ni­sa­trices –, formes qu’il est dif­fi­cile de regrou­per dans une concep­tion d’ensemble, mais qui impliquent des concepts comme ceux d’ambivalence, de sadisme, de cruau­té, de haine, d’emprise, etc.
Aus­si, avant d’aborder les dif­fé­rents contours méta­psy­cho­lo­giques aux­quels la vio­lence peut ren­voyer, je sou­haite rap­pe­ler quelques géné­ra­li­tés.

La / les violence(s) : quelles défi­ni­tions ?

Syno­nyme d’une force en acte d’un carac­tère intense et par­fois exces­sif, la vio­lence peut se défi­nir comme une force aveugle de dimen­sion natu­relle (on peut même évo­quer à son sujet un « enra­ci­ne­ment dans la nature »), force qui se déploie sans inten­tion, ni orien­ta­tion, par­ti­cu­lière et qui déferle dans le milieu où elle s’est mani­fes­tée (A.Green, 1995).
Chez l’Homme, la vio­lence se tra­duit comme la force agis­sante d’une dimen­sion natu­relle de type phy­sique en rela­tion avec une dimen­sion psy­chique, laquelle est le propre du carac­tère humain. Située au car­re­four de toutes les orga­ni­sa­tions, ou désor­ga­ni­sa­tions, psy­chiques chez l’homme, la vio­lence, qui se ren­contre dans toutes les formes du vivant, peut donc se défi­nir comme un état natu­rel, relié à l’ordre du vital, comme à la vie elle-même.
C’est à Jean Ber­ge­ret (1984, 1994)   – qui a consa­cré une par­tie de son œuvre psy­cha­na­ly­tique à l’étude du concept de vio­lence dans le psy­chisme humain – que nous devons le fait d’avoir rap­pe­lé que le terme de vio­lence, qui dérive du radi­cal indo-euro­péen (βiF), vient du mot grec (βiα) et du mot latin (vita), qui défi­nissent la vie, la force vitale, l’élan de sur­vie.
Comme je l’ai évo­qué plus haut – car il est tou­jours néces­saire de le rap­pe­ler –, en psy­cha­na­lyse, la vio­lence doit être conçue sous l’angle de la force pul­sion­nelle (c’est-à-dire de la pul­sion et de sa pous­sée constante) : inhé­rente à la pul­sion elle-même, carac­té­ri­sant celle-ci au cœur de son acti­vi­té même, la force pul­sion­nelle est une force sourde, aveugle, laquelle en per­ma­nence ne cesse de faire pres­sion au sein du psy­chisme pour obte­nir une, ou des, satisfaction(s).
De ce fait toute pul­sion – dont je rap­pelle qu’elle est un ‘concept limite entre psy­chique et soma­tique’ – est par nature poten­tiel­le­ment vio­lente et le devient lorsqu’elle n’est pas signi­fiée, recon­nue et satis­faite, ou lorsque vient s’opposer une répres­sion venue de l’extérieur (ain­si, par ex., un inter­dit). Lorsque la pul­sion n’obtient pas la réponse satis­fai­sante espé­rée, l’agressivité liée à la frus­tra­tion res­sen­tie (le manque) exa­cerbe alors la vio­lence poten­tielle.

C’est ain­si que le fonc­tion­ne­ment pul­sion­nel, qui cherche aveu­glé­ment satis­fac­tion, est la source des conflits (dont les expres­sions peuvent être vio­lentes) du fait de l’action en jeu des forces psy­chiques oppo­sées. Lors de la cure psy­cho­thé­ra­pique ou psy­cha­na­ly­tique (que ce soit chez l’enfant, ou chez l’adulte) ces forces s’expriment dans la rela­tion trans­fé­ren­tielle, ce qui fait que l’on peut dire que « la vio­lence est la puis­sance latente qui gît au cœur de tout trans­fert » (A.Green, 1995)  .
Par ailleurs on ne doit pas omettre de rap­pe­ler et avoir pré­sent à l’esprit que la vio­lence psy­chique met en jeu le corps et la dimen­sion cor­po­relle, tant chez soi que chez l’autre, tant chez celui qui met en acte une vio­lence, que chez celui qui la reçoit, ou la subit. C’est ain­si qu’elle peut aus­si se défi­nir comme « une effrac­tion dans le corps, ou dans la psy­ché, d’un Autre qui n’est pas recon­nu, ou res­pec­té, en tant que tel » (J.Gammil, 2008)  .

Ambi­va­lences et agres­si­vi­tés

Même s’il a été appa­rem­ment dif­fi­cile à S.Freud de recon­naître, avant les années 1920, l’importance, sous leur vocable propre, de notions telles que l’hostilité et l’agressivité (ain­si que la vio­lence qui leur est inhé­rente), on doit cepen­dant rap­pe­ler qu’elles sont pré­sentes de manière indis­cu­table dans les défi­ni­tions de concepts fon­da­men­taux que j’ai évo­qué plus haut, comme par exemple, et en pre­mier lieu, le concept d’ambivalence, et de ce qui s’y réfère dans cer­taines de ses expres­sions, à savoir le sadisme, la haine, l’emprise, etc., les­quelles expres­sions sont autant de registres qui inté­ressent les pul­sions sexuelles et l’organisation libi­di­nale1.
L’ambivalence, comme on le sait, est au cœur du conflit psy­chique, notam­ment du fait qu’elle est inti­me­ment liée au concept de pul­sion2  . Je cite S.Freud : « L’amour et la haine se dirigent très sou­vent simul­ta­né­ment sur le même objet, cette coexis­tence four­nit aus­si l’exemple le plus impor­tant d’une ambi­va­lence des sen­ti­ments » (S.Freud, 1915.  ). Du fait de l’opposition entre « aspi­ra­tion égoïste au bon­heur abso­lu » et « aspi­ra­tion au bon­heur avec autrui », il faut rete­nir que, dès son ori­gine, la pul­sion est dua­liste, comme S.Freud est conduit à l’avancer un peu plus tard, dans Malaise dans la civi­li­sa­tion (S.Freud, 1929  ).
Ceci a pour consé­quence le fait que l’investissement d’objet est lui aus­si, par essence, dua­liste en rai­son des sen­ti­ments oppo­sés que sont l’amour et la haine3 à pro­pos des­quels S.Freud, dès la pre­mière théo­rie des pul­sions, déter­mine une hié­rar­chie dans leur genèse, éta­blis­sant une anté­rio­ri­té concer­nant l’apparition de la haine du fait que celle-ci est cor­ré­la­tive à l’apparition de l’objet, lequel ‘naît’ dans la haine : « L’extérieur, l’objet, le haï seraient tout au début iden­tiques »  .

Si l’amour peut être rap­por­té à l’investissement éro­tique de l’objet d’étayage et à la pul­sion sexuelle, la haine, elle, a une ori­gine dif­fé­rente puisqu’elle cor­res­pond à la « lutte du moi pour sa conser­va­tion et son affir­ma­tion » ain­si qu’elle cherche à main­te­nir un ‘moi-plai­sir puri­fié’ (lequel est le fon­de­ment pul­sion­nel de ce que devien­dra la néga­tion).
La haine est donc plus ancienne que l’amour en tant que « rela­tion à l’objet » puisqu’elle pro­vient « du refus ori­gi­naire que le moi nar­cis­sique oppose au monde exté­rieur », ce qui « pro­digue des exci­ta­tions »   ajoute S.Freud, sou­li­gnant ain­si la mise en jeu impli­cite d’une forme de vio­lence latente qui peut venir à s’exprimer sous la forme d’une agres­si­vi­té patente4  .

Le conflit d’ambivalence est ain­si, sans aucun doute, le conflit le plus fon­da­men­tal dans la cure ana­ly­tique (trans­fert). C’est dans le registre du conflit d’ambivalence que s’articulent les inves­tis­se­ments éro­tiques de l’objet de trans­fert (objets de désir séduc­teur ou objets à séduire), ain­si que les attaques hai­neuses, comme des­truc­trices, qui le concernent. C’est ain­si que l’activation (l’actualisation) des conflits qui se déve­loppent sur la scène ana­ly­tique s’ancre sur le sta­tut, vécu comme ambi­va­lent, de l’objet ana­lyste, celui-ci deve­nant, par pro­jec­tion, le sup­port d’un conflit ima­goïque entre ‘bon’ et ‘mau­vais’ objet.
Il est donc néces­saire de dis­so­cier l’opposition entre amour et haine de l’opposition entre bon et mau­vais (posi­tif et néga­tif) : ain­si la haine (comme la vio­lence qui lui est asso­ciée) peut avoir une fonc­tion posi­tive par réfé­rence à l’affirmation nar­cis­sique du sujet et sa fonc­tion de dif­fé­ren­cia­tion d’avec l’objet (par ex., pour se sépa­rer il est néces­saire de haïr). De même, l’amour (comme la vio­lence qu’il entraîne – c’est-à-dire, la pas­sion dans toutes ses expres­sions du ‘pas­sion­nel’) peut, à l’inverse, avoir une fonc­tion néga­tive du fait de sa visée d’indifférenciation et d’aspiration par l’objet.

Cepen­dant, pour cer­tains freu­diens, il est abso­lu­ment néces­saire de dis­tin­guer la vio­lence de l’agressivité, qui ne seraient pas du même registre.
C’est ain­si que pour J.Bergeret, l’agressivité ne doit pas être confon­due avec la vio­lence, dans la mesure où, indé­pen­dam­ment de la sexua­li­té, il existe un « ins­tinct violent, natu­rel, inné, uni­ver­sel et pri­mi­tif » (une « cruau­té ins­tinc­tuelle pri­mi­tive »), véri­table « vio­lence fon­da­men­tale » qui per­met au cou­rant libi­di­nal de se déve­lop­per ; par ailleurs, les buts de cette bru­ta­li­té pri­mi­tive – laquelle appar­tien­drait à l’héritage archaïque violent de tout être humain –, ne seraient pas sous-ten­dus par une inten­tion par­ti­cu­liè­re­ment ‘bonne’ ou ‘mau­vaise’ car elles s’orienteraient tout autant vers la ten­dresse, que vers l’agressivité.
Pour J.Bergeret, cette dyna­mique vio­lente, nar­cis­si­que­ment pri­maire [ou peut-être plus pré­ci­sé­ment ‘pri­mi­tive’], met d’emblée en jeu un conflit de ‘sur­vie’ qui est de l’ordre d’un « c’est lui, ou c’est moi » et qui ne s’inscrit pas dans l’optique d’un conflit géni­tal ; ce n’est que secon­dai­re­ment qu’elle s’intégrerait au sein du cou­rant libi­di­nal pour être alors au ser­vice des ten­dances sexuelles, ce qui per­met de redon­ner un sens nou­veau à la dyna­mique vio­lente ori­gi­naire.
Pour l’auteur, la ‘vio­lence’ ne devien­drai patho­lo­gique que :
– lorsque la vio­lence pri­mi­tive ne serait pas refou­lée, mais serait répri­mée et qu’elle s’inhiberait alors ;
– ou que le cou­rant sexuel qui, en s’unissant au cou­rant violent, vien­drait à se ‘per­ver­tir’ et don­ne­rait alors lieu à une vio­lence agres­sive – une agres­si­vi­té – qui, du fait qu’elle n’aurait pu trou­ver à s’étayer et trou­ver un objet (pri­maire) conte­nant et trans­for­ma­teur, pren­drait alors plai­sir à faire mal à l’objet (sadisme, cruau­té, emprise, etc.).
Si des auteurs, comme J.Bergeret, sou­tiennent ce point de vue, c’est dans l’intention, entre autres, de cher­cher à ‘inno­cen­ter’ (ou à en ‘décul­pa­bi­li­ser’ les effets) la vio­lence, à la quelle ils accordent une valeur orga­ni­sa­trice, tout en sou­hai­tant affran­chir celle-ci des aléas d’une agres­si­vi­té dont l’expression vio­lente serait par trop intri­quée au pul­sion­nel et, par voie de consé­quence, à l’érotisme, ce qui, pour le coup, la ren­drait alors désor­ga­ni­sa­trice (sado-maso­chisme, retour­ne­ment de la vio­lence contre soi, etc.).

Pour autant que l’on doive recon­naître l’intérêt d’une telle pro­po­si­tion, néan­moins on peut argu­men­ter ce point de vue car :
– d’une part, il cher­che­rait à réfu­ter l’idée que, bien que de nature nar­cis­sique, les pul­sions d’auto-conservation doivent néces­sai­re­ment pou­voir dis­po­ser de l’agressivité afin de rem­plir leur rôle ;
– d’autre part, il rejet­te­rait la théo­rie du dua­lisme pul­sion­nel (pul­sions de vie / pul­sions de des­truc­tion), ain­si que la vio­lence des­truc­trice qu’elle recouvre, de laquelle elle ne peut être dis­so­ciée.

Des­truc­ti­vi­tés (Intri­ca­tion / Dés­in­tri­ca­tion, Liai­son / Déliai­son)

Reve­nons à pré­sent sur la seconde (et der­nière) théo­rie des pul­sions.
Elle per­met de com­prendre que, en tant qu’avatars de l’ambivalence, la vio­lence et la des­truc­ti­vi­té sont autant d’issues pos­sibles du conflit pul­sion­nel entre Eros et Tha­na­tos.
Avec cette avan­cée théo­rique qui per­met de repé­rer toute conflic­tua­li­té dans une oppo­si­tion entre pul­sion de vie et pul­sion de mort, S.Freud situe l’amour et la haine comme pro­cé­dant réci­pro­que­ment, d’une part, d’une pul­sion éro­tique (libi­di­nale) de liai­son à l’objet (intri­ca­tion, objec­ta­li­sa­tion), et, d’autre part, d’une pul­sion des­truc­trice de déliai­son (dés­in­tri­ca­tion, désob­jec­ta­li­sa­tion). Tout phé­no­mène psy­chique devient par défi­ni­tion le résul­tat de cet alliage.

Mais, qu’est-ce que lier veut dire ?
Lier c’est don­ner au sujet un sens (et une mise en repré­sen­ta­tion) aux mani­fes­ta­tions psy­chiques du sujet, qu’il soit infans [le nour­ris­son, l’enfant avant l’acquisition du lan­gage], enfant ou adulte ; c’est aus­si don­ner au sujet la pos­si­bi­li­té de s’approprier ce sens et de lui per­mettre ain­si de rem­pla­cer des formes de vio­lence désor­ga­ni­sa­trices par d’autres formes, plus atté­nuées (modé­rées), tout en ne rom­pant pas le lien avec l’objet, même s’il n’est pas com­blant, voire frus­trant, du fait qu’il n’apporte pas la (les) satisfaction(s) espérée(s).
Lier, c’est aus­si réunir et intra-psy­chi­que­ment et inter-sub­jec­ti­ve­ment. Mais, comme l’écrit A.Green, auquel j’emprunte ces pro­pos, « ce qui a été lié ne fait pas pour autant dis­pa­raître la puis­sance de déliai­son orga­ni­sa­trice, celle-ci est sim­ple­ment ber­cée, endor­mie, invi­tée à rêver. Elle n’est pas neu­tra­li­sée, seule­ment déri­vée, atté­nuée, dif­fé­rée » (A.Green, 1995).
C’est à par­tir du moment où la psy­ché, pri­vée de son lien à l’objet, ne peut plus assu­rer la fonc­tion de liai­son de l’excitation que la vio­lence peut sur­gir. Ain­si, en est-il du but de l’action qui consiste à prendre soin et à éle­ver des enfants : leur per­mettre de lier leurs poten­tia­li­tés des­truc­trices (en rela­tion avec la des­truc­ti­vi­té pul­sion­nelle) ; c’est lorsque ce pro­ces­sus ne se déve­loppe pas suf­fi­sam­ment, que les expres­sions de la vio­lence du sujet ne peuvent, ou ne peuvent plus, être conte­nues5.

D’où l’importance fon­da­men­tale du rôle de l’objet chez l’infans (le rôle des objets pri­maires – ou de ce qui en tient lieu) et dont je sou­haite ici rap­pe­ler, en les esquis­sant, les dif­fé­rentes fonc­tions fon­da­men­tales qui per­mettent la régu­la­tion du fonc­tion­ne­ment éco­no­mique et qui assurent la qua­li­té de l’intrication pul­sion­nelle (pul­sions de vie / pul­sions de des­truc­tion). Ces fonc­tions sont :
– la capa­ci­té de satis­fac­tion libi­di­nale ;
– la cou­ver­ture nar­cis­sique [impor­tance de la bles­sure nar­cis­sique créée si l’enfant n’est pas dési­ré et vécu comme le pro­lon­ge­ment nar­cis­sique de ses parents, inves­ti par eux comme indi­vi­du à décou­vrir, à obser­ver, et donc comme objet de fan­tasmes qui viennent, entre autres, nour­rir en retour la ‘rêve­rie mater­nelle’ (comme la ‘rêve­rie paren­tale’)] ;
– la capa­ci­té conte­nante asso­ciée à,
– la capa­ci­té trans­for­ma­trice [par ex., détoxi­quer la ‘peur de mou­rir’ de l’infans en ayant, entre autres, une capa­ci­té à rece­voir ses angoisses  sans pro­jec­tions rétor­sives en retour (iden­ti­fi­ca­tion pro­jec­tive non patho­lo­gique)] ;
– enfin, last but not least, la capa­ci­té à être un pare exci­tant et, in fine, à être un objet d’étayage [l’étayage nar­cis­sique par l’objet (externe et / ou pri­maire) est d’autant plus néces­saire que la vio­lence pul­sion­nelle fait rage, dans un appa­reil psy­chique fai­ble­ment orga­ni­sé pour la conte­nir et la sym­bo­li­ser ce qui entraîne le fait que l’amour et la haine res­tent indif­fé­ren­ciés (non dis­cri­mi­na­tion entre l’un et l’autre)].

Dès sa nais­sance [et l’on est, aujourd’hui, en droit de pen­ser avant même celle-ci], l’infans subit inévi­ta­ble­ment, et de manière per­ma­nente, des exci­ta­tions qui pro­viennent tout autant de son monde interne (pul­sion­nel), que du monde externe, exci­ta­tions qui sont vécues comme autant d’expériences psy­chiques de type vio­lentes.
Concer­nant le plan externe, la vio­lence est liée à la totale dépen­dance dans laquelle l’infans se trouve vis-à-vis des soins qui entraîne chez lui un sen­ti­ment d’impuissance. Concer­nant le plan interne, la vio­lence vécue est liée à la force pul­sion­nelle qui peut débor­der l’infans si celle-ci n’est pas atté­nuée par l’objet (la mère, ou l’environnement) qui dis­pense les soins et qui doit, autant que faire se peut, répondre à l’urgence de la demande (de l’ordre du besoin – faim, dou­leur, etc.), ain­si que de prendre en charge les angoisses qui en résultent.
Si l’infans est conduit à ne pas sen­tir de réponse à ceux (besoins) et celles-ci (angoisses), comme à ne pas avoir le sen­ti­ment que ses émer­gences pul­sion­nelles sont prises en compte et accep­tées par l’objet6  , des élé­ments (ou des évè­ne­ments) psy­chiques de type défen­sifs appa­raissent pour lut­ter contre la vio­lence de la souf­france psy­chique qui n’arriverait pas à s’élaborer et qui confine alors à des états de dou­leur [en rela­tion à une haine qui ne trouve pas son, ou ses, objet(s)].

Cette dou­leur, qui peut-être d’ordre per­sé­cu­trice, ou dépres­sive, pose non seule­ment la ques­tion de la vio­lence pul­sion­nelle, mais aus­si celle de la vio­lence des méca­nismes de défenses (J.Bégoin, 1987) mis en œuvre contre celle-ci (notam­ment, déni, cli­vage, désa­veu, for­clu­sion, extro­jec­tion, pro­jec­tion et / ou iden­ti­fi­ca­tion pro­jec­tive patho­lo­gique, idéa­li­sa­tion, omni­po­tence, etc.). La dou­leur résul­te­rait alors de l’intériorisation pri­maire d’un objet ‘insuf­fi­sam­ment bon’, res­sen­ti comme non-dis­po­nible, reje­tant, intru­sif, empié­tant, omni­po­tent, voire endom­ma­gé, ou détruit.
L’intensité des affects (notam­ment hai­neux) qui accom­pagnent ces états de dou­leur peut, par­fois, conduire le sujet à une véri­table détresse psy­chique. Dans les formes les plus extrêmes, qui peuvent être incons­cientes, ceci se tra­duit par une expé­rience psy­chique des­truc­trice dont le vécu peut être décrit comme « ago­nie pri­mi­tive » (S.Ferenczi), « menace d’effondrement » ou « désastre psy­chique » (D.W.Winnicott), voire « catas­trophe interne » (W.R.Bion).

On peut pen­ser que la vio­lence (les dif­fé­rentes formes de vio­lence) vien­drait alors tra­duire :
– la non éla­bo­ra­tion des fan­tasmes pri­mi­tifs cruels, qui entraîne des actes (des agirs), les­quels sont le moyen d’évacuer les conte­nus de ces fan­tasmes incons­cients ;
– une réponse ‘aveugle’ à la bles­sure nar­cis­sique vécue comme une attaque du sujet, de son droit à l’existence ou de sa valeur ; la réponse vio­lente est tout autant l’expression de sen­ti­ments de haine que d’amour déçu sur fond d’insécurité et d’expression de colères clas­tiques, ou de rage [du fait que le sujet ne pense pas pou­voir se repo­ser sur un inves­tis­se­ment nar­cis­sique de base qui per­mette l’espoir] ;
– l’action du sur­moi [sur­moi en l’occurrence cruel] qui peut entraî­ner des actions de type vio­lentes et cri­mi­nelles par sen­ti­ment de culpa­bi­li­té [S.Freud, 1928, ‘Dos­toïevs­ki et le par­ri­cide’  ] ;
– l’iden­ti­fi­ca­tion à un sur­moi pri­mi­tif et sadique (sur­moi patho­lo­gique) ; ex., la mélan­co­lie, qui peut entraî­ner chez un sujet des actes d’une rare vio­lence à l’égard des autres (meurtre), comme à son propre égard (sui­cide) ;
– l’iden­ti­fi­ca­tion à l’agresseur, en rela­tion au défaut d’élaboration de l’expérience d’avoir été, ou de s’être sen­ti, la vic­time d’une séduc­tion ou d’un atten­tat sexuel ;
– la ‘ter­reur sans nom’ du sujet qui peut éprou­ver la néces­si­té de pro­vo­quer immé­dia­te­ment chez l’autre une situa­tion de ter­reur : faire peur aux autres pour faire taire sa propre peur… [ce méca­nisme de défense pou­vant être proche de l’identification pro­jec­tive patho­lo­gique ?] ;
– le déses­poir qui peut entraî­ner une rage des­truc­trice, etc.

A pro­pos de la haine : vio­lences désor­ga­ni­sa­trices, vio­lences orga­ni­sa­trices

La des­truc­ti­vi­té, comme la vio­lence qu’elle entraîne, peut être aus­si le résul­tat d’identifications de l’enfant aux dif­fé­rents dési­rs incons­cients (notam­ment hai­neux et meur­triers) des parents, ain­si qu’à leur capa­ci­té d’investissement (par­fois dif­fi­cile) le concer­nant. Le pen­chant qu’il aura à la des­truc­tion (tout aus­si bien détruire, que se détruire) dépen­dra du fait qu’il aura pu être un enfant dési­ré ou non dési­ré, inves­ti ou non inves­ti (voire même, bru­ta­le­ment dés­in­ves­ti), aimé ou haï, valo­ri­sé ou déva­lo­ri­sé, etc.
Sa des­truc­ti­vi­té (en lien à son maso­chisme pri­maire) dépen­dra aus­si de la manière dont il a pu éta­blir (orga­ni­ser) ses défenses pour se pro­té­ger de la haine, tant de celle qu’il éprouve (entre autres, du fait de la dou­leur), que de celle dont il a été l’objet. A pro­pos de celle-ci, je rap­pelle, entre autres, les pro­pos tenus par D.W.Winnicott, dans son article ‘La haine dans le contre-trans­fert’ (1947)   : « J’émets l’hypothèse que la mère hait le petit enfant avant que l’enfant ne puisse haïr sa mère et avant de savoir que sa mère le hait ». Je rap­pelle que D.W.Winnicott consi­dère cette haine comme orga­ni­sa­trice, car au cœur du pro­ces­sus de sépa­ra­tion / indi­vi­dua­tion.

La des­truc­ti­vi­té est un effet de la haine éprou­vée, comme reçue, qu’elle soit répri­mée, refou­lée ou même, ce qui est le plus sou­vent le cas, cli­vée puis pro­je­tée (ou extro­jec­tée – iden­ti­fi­ca­tion pro­jec­tive). Mais la des­truc­ti­vi­té ne se défi­nit pas seule­ment au regard de la capa­ci­té de détruire [elle n’est pas seule­ment liée à la pul­sion de mort (à la pul­sion des­truc­trice)], car elle fait aus­si par­tie de la vie : « Détruire n’est pas un acte créa­teur, mais créer est un acte de décons­truc­tion des formes anciennes, une ‘absorp­tion / dégra­da­tion’ qui per­mettent leur trans­for­ma­tion » (R. Kaës, 2007)7.

De même il appa­raît qu’une autre forme de vio­lence d’ordre pri­maire est un enjeu essen­tiel de l’organisation psy­chique chez l’infans et je pense ici à ce que P.Aulagnier a nom­mé ‘violence anti­ci­pa­trice’ ou ‘vio­lence de l’interprétation’  .
Pour l’auteur, la mère dès la nais­sance de l’enfant va inter­pré­ter les besoins de celui-ci, autre­ment dit elle doit ‘anti­ci­per’ ce qui lui per­met­tra de pou­voir vivre avec un mini­mum de confort et de plai­sir. Pour P.Aulagnier, l’interprétation que la mère fait des dési­rs de l’infans devient l’équivalent d’une ‘vio­lence mater­nelle’, du seul fait que le désir de la mère cherche à sus­ci­ter chez son enfant un affect de plai­sir tel qu’elle l’a anti­ci­pé, en réponse à une demande.
La ‘vio­lence pri­maire’ est ain­si créée par l’interaction psy­chique qui résulte de l’intrication du désir de l’un, sur l’objet d’un besoin de l’autre, l’infans, lequel est, par ailleurs, dému­ni par sa pré­ma­tu­ri­té.
Ain­si l’attention vigi­lante peut com­por­ter de mul­tiples risques par ses excès mêmes [mais, aus­si, par ses défauts…], l’inadéquation des soins pou­vant entraî­ner un dys­fonc­tion­ne­ment du corps, des affec­tions soma­tiques, des troubles ali­men­taires, des troubles du som­meil, comme des troubles de l’activité de pen­sée.
A la vio­lence de l’interprétation décrite par P.Aulagnier, on peut aus­si ajou­ter celle décrite par D.Braunsweig et M.Fain à pro­pos de ce qu’ils nomment la ‘cen­sure de l’amante’ et qui concerne ce que la ‘mère, sexuelle, de la nuit’, lorsqu’elle retrouve le père (en fan­tasme et / ou dans la réa­li­té), vient impo­ser à son ‘enfant du jour’ auquel elle donne des soins  .
De la même façon, on peut affir­mer que tout ce qui contri­bue à l’organisation des fan­tasmes, notam­ment les fan­tasmes ori­gi­naires (de séduc­tion, de cas­tra­tion et de scène pri­mi­tive), contient des poten­tia­li­tés vio­lentes du fait des inter­dits et donc du renon­ce­ment pul­sion­nel dont ils sont issus (par ex., entre autres, l’interdiction du can­ni­ba­lisme, de l’inceste, du meurtre de son sem­blable, etc.).

Comme je le rap­pe­lais plus haut, par­tie inté­grante de la struc­ture humaine fon­da­men­tale, la vio­lence sur­git ain­si à tous les car­re­fours de l’organisation / désor­ga­ni­sa­tion psy­chique. Qu’elle soit au ser­vice de l’autoconservation, du nar­cis­sisme, de l’objectalisation, de la des­truc­ti­vi­té (désob­jec­ta­li­sa­tion), on en per­çoit l’extrême pré­sence dans les expres­sions fan­tas­ma­tiques (conscientes ou incons­cientes) chez tout sujet, qu’elles soient des expres­sions de type oral can­ni­ba­lique (incor­po­ra­tion), de type anale (sadique anale), de type phal­lique ou plus bana­le­ment géni­tale (cas­tra­tion).
Elle se carac­té­rise aus­si par le fait que ses des­tins, et j’en ter­mi­ne­rai par là en les rap­pe­lant, sont de trois ordres, des plus désor­ga­ni­sa­teurs au plus orga­ni­sa­teur :
– si l’objet n’est pas en mesure de lier la vio­lence à l’érotisme, ceci entraîne, dans l’échange libi­di­nal, un défi­cit grave de la mise au ser­vice des pul­sions agres­sives qui se trouvent alors détour­nées de leur fonc­tion de sou­tien des agres­sions diri­gées vers l’objet ; celles-ci (les pul­sions) peuvent alors se retour­ner contre le sujet dans une visée auto-des­truc­trice (‘haine de soi’ et ‘sur­moi cruel’ qui conduisent tout autant au sacri­fice, qu’au sui­cide) ;
– ceci peut aus­si entraî­ner une absence de la capa­ci­té et donc de l’expression pos­sible d’une vio­lence mani­feste, ceci condui­sant à une voie de désob­jec­ta­li­sa­tion abso­lue, véri­table ‘vio­lence blanche’ (ou ‘vio­lence inno­cente’), qui vien­drait signer la non signi­fiance de l’autre et pro­cla­me­rait ain­si l’inexistence de l’objet, voire l’indifférence radi­cale du sujet à la pré­sence ou à l’absence de celui-ci ; vio­lence d’autant plus cruelle que, je le rap­pelle, rien n’est en fait plus cruel que l’indifférence ;
– soit, troi­sième des­tin, lequel semble être une voie moyenne et sal­va­trice pour la psy­ché : la vio­lence s’avère être en mesure de pou­voir s’intriquer à l’érotisme (sadisme et maso­chisme) grâce à ce que l’on peut conve­nir être le ‘tra­vail de l’objet’ (cf, par ex., sa ‘capa­ci­té de rêve­rie’), lequel donne ain­si une chance  au sujet de se l’approprier et l’intégrer à son ‘pro­ces­sus civi­li­sa­teur’, comme à ses voies créa­trices et subli­ma­toires.

Thier­ry Boka­nows­ki, psy­cha­na­lyste titu­laire for­ma­teur SPP.

Biblio­gra­phie :
Bégoin J. (1987), Névrose et trau­ma­tisme, Revue fran­çaise de Psy­cha­na­lyse, 3, 51, p.999‑1019.
Ber­ge­ret J. (1984), La vio­lence fon­da­men­tale, Paris, Payot ; (1994), La vio­lence et la vie, Paris, Payot.
Braun­sch­weig D. et Fain M. (1975), La nuit, le jour, Le fil rouge, Paris, P.U.F.
Cas­to­ria­dis – Aula­gnier (1975), La vio­lence de l’interprétation. De l’énoncé au pic­to­gramme, Paris, P.U.F.
Freud S. (1915), Pul­sions et des­tins des pul­sions, in Méta­psy­cho­lo­gie, Paris, Gal­li­mard, 1968, p.11–43.
Freud S. (1929), Malaise dans la civi­li­sa­tion, Paris, P.U.F., 1971.
Freud S. (1928), Dos­toïevs­ki et le Par­ri­cide, in Résul­tats, idées, pro­blèmes, II., Paris, P.U.F., 1985, p.161–179.
Gam­mill J. (2008), La posi­tion dépres­sive au ser­vice de la vie, Edi­tions In Press, 2007.
Green A. (1995), Sources, pous­sées, buts, objets de la vio­lence, in ‘Des­tins de la vio­lence’ (Col­loque de Mona­co), Jour­nal de la psy­cha­na­lyse de l’enfant, 18, Paris, Bayard Edi­tions, p.215–260.
Kaës R. (2007), Notes sur la vio­lence et la des­truc­ti­vi­té dans les Groupes, in « La des­truc­ti­vi­té », Jour­nal de la psy­cha­na­lyse de l’enfant, N°39, p.187–206.
Win­ni­cott D.W. (1947), La haine dans le contre-trans­fert, in De la pédia­trie à la psy­cha­na­lyse, Paris, Payot, 1969, p.48–58.

NOTES :

  1. Ce n’est qu’après avoir sou­li­gné l’importance de l’ambivalence dans le trans­fert [La dyna­mique du trans­fert (1912) ], que S.Freud s’est trou­vé en mesure d’envisager l’agressivité comme une mani­fes­ta­tion rela­tion­nelle cou­rante, mais dont l’origine n’est ni homo­gène, ni unique. Il semble que par la suite il ait tou­jours consi­dé­ré l’agressivité comme étant en lien (tant sur le plan de l’univers des fan­tasmes, que sur le plan des symp­tômes et de la cli­nique) avec, d’une part, des motions affec­tives hos­tiles et, d’autre part, les motions éro­tiques.
  2. L’essentiel de la théo­rie de l’ambivalence, qui s’appuie sur la théo­rie des pul­sions, a consis­té à mon­trer que le jeu et le rap­port dia­lec­tique entre l’amour et la haine à l’égard d’un objet est à la base du conflit psy­chique, ain­si que les dif­fé­rentes mesures (psy­chiques) pour y faire face.
  3. En fait, sen­ti­ments com­plé­men­taires qui ne sont pas dans un total rap­port de symé­trie, dans la mesure où l’opposé de l’amour n’est pas la haine, mais l’indifférence.
  4. Dès lors, le fait de recon­naître la fonc­tion du nar­cis­sisme conduit S.Freud à devoir dépla­cer la mise en ten­sion du couple pul­sions d’auto-conservation / pul­sions sexuelles, sur le couple inves­tis­se­ment nar­cis­sique / inves­tis­se­ment objec­tal, cette mise en ten­sion conflic­tuelle étant source d’agressivité (et donc impli­ci­te­ment de vio­lence).
  5. En d’autres termes, la vio­lence agie, c’est-à-dire l’agression d’un sujet sur autrui qui vise à l’anéantir, sur­git au moment où la psy­ché, pri­vée de son lien à l’objet, ne peut plus assu­rer sa fonc­tion de liai­son de l’excitation.
  6. Lequel serait poten­tiel­le­ment en mesure de les trans­for­mer du fait, qu’entre autres, il ne les vivrait pas comme des­truc­trices
  7. Ici, on peut pen­ser que l’auteur se rap­proche de cer­taines concep­tions de W.R.Bion (appa­reil psy­chique dont le fonc­tion­ne­ment peut être com­pa­rable à celui de l’appareil diges­tif).